Pourquoi ce disque de Pascal Monteilhet, avant son départ aux Philippines, n’est pas l’événement attendu ? Ce n’est pas dû au plateau prestigieux : à Monteilhet une sérénité, à Amandine Beyer une préciosité, à Amélie Michel, la fantaisie, à Marianne Muller un son, une invitation au voyage. Et de fait, la première écoute est une berceuse nostalgique, mais cela ne suffit pas. Le problème viendrait-il du compositeur ? C’est impossible pour un élu qui jouait en compagnie de Marais, Forqueray et Couperin pour Louis XIV. Il faut donc qu’il y ait eu de grands dangers dans les choix d’historicité du disque. Le premier est de proclamer dans la notice « les règles du bon goût », judicieuses mais brides à l’imagination, beauté du « rien de trop » - mais que devient la rhétorique ? Le deuxième danger fut d’avoir cru trop fortement à la qualité mélodique de De Visée quand celui-ci édita ses œuvres de théorbe ou de luth mises « en partition pour dessus et basse (continue)». Or, s’il y a bien une mélodie chez De Visée, ce n’est pas celle d’un Marais rompu à des instruments imitant le chant, mais une autre, proche du discours parlé. Quand le théorbe joue seul, la ligne de basse soutient la mélodie par son enrichissement harmonique, ce qui pallie le son éphémère. Les accords constituent ainsi une mélodie rhétorique, souvent en de beaux arrêts théâtraux, tels qu’ils s’expriment dans le tombeau des Demoiselles de Visée, sous les doigts d’un Hopkinson Smith. A la viole, pour cette même pièce, Marianne Muller, pas assez fusionnelle avec la basse, se trouve dans une position difficile et se lance, comme précédemment le violon et la flûte, dans une lecture quasi monodique d’une œuvre avant tout harmonique. D’autant que les interprètes ont renoncé à un accompagnement au clavecin et à la basse de viole, comme le recommandait l’auteur, pour laisser au discret théorbe le soin d’assurer une unité avec ses pièces en solo. Dans cette situation, seule la flûte, très éloignée de hauteur et de timbre, permet de garder une bonne lecture. Déséquilibre accoustique ou transcription insuffisante ? Aurait-il fallu grossir le lien de la basse et du dessus en faisant un travail d’orchestre, par exemple en rajoutant un deuxième dessus comme chez Gaspard Le Roux pour complèter l’harmonie ? En soliste, Pascal Monteilhet ne rachète pas ces difficultés, appauvri par une prise de son applanissante. On est loin de la verve d’un Egüez (au théorbe « de pièces », plus aigu d’une quarte que le théorbe « d’orchestre » et plus historique). Pour découvrir De Visée, mieux vaut donc retourner au premier disque de Pascal Monteilhet et considérer que la dernière mouture ne peut constituer des « adieux » et nécessite « un retour »…
Robert de Visée
(1658/60 ? – ca 1732)
Suites pour théorbe mises en partition 1716
Pascal Montheilhet, théorbe, Amélie Michel, traverso, Amandine Beyer, violon, Marianne Muller, viole
Zig Zag ZZT051101 distr. Harmonia Mundi
Enregistrement 7, 8 juin 2004, 19 et 20 avril 2003. TT : 67’28’’
Robert de Visée
(1658/60 ? – ca 1732)
Suites pour théorbe mises en partition 1716
Pascal Montheilhet, théorbe, Amélie Michel, traverso, Amandine Beyer, violon, Marianne Muller, viole
Zig Zag ZZT051101 distr. Harmonia Mundi
Enregistrement 7, 8 juin 2004, 19 et 20 avril 2003. TT : 67’28’’
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