jeudi 13 septembre 2007

Combas poète cinéphage

La féerie du monde imaginaire de Combas n’a d’égale que sa force symbolique et psychologique. Comme Ben, Combas a lancé en 1979 le mouvement de figuration libre. Il commence à Saint-Etienne avec des Mickeys puis, à Paris, il est frappé par l’iconographie ethnique des enseignes populaires. Pour lui, un peintre naïf, quand il est tellement mauvais, en devient bon parce qu’il exprime au-delà de sa volonté. On le voit : Combas est aussi poète et rimeur. Son dessin, pas tout à fait naïf, part de la bande dessinée pour sortir du réalisme et se tourner vers l’abstraction mais avec une force brute, sexuelle, rock et plongée dans notre monde vulgaire. Evidente influence de Picasso, de l’art africain, du Pop-art mais aussi et surtout une imagination foisonnante proche de la culture de l’Amérique latine ou la candeur des gravures grossières des XVI° et XVII° siècles. L’utilisation du noir pour les contours, marque personnelle, a trouvé à Cannes dans cet hommage au Cinéma un degré de sophistication radical. Les personnages en sont à la fois lumineux et prisonniers dans leur foisonnement de péripéties et d’humours sarcastiques. Ce qui frappe, notamment dans la grande salle, c’est que sa technique de contraste est aujourd’hui si poussée que l’on a l’impression à la fois d’un bas-relief mais aussi d’une pellicule de film, en négatif, éclairée par une lumière derrière l’œuvre. On peut aimer, ne pas aimer, mais comprendre l’artiste est une belle démarche artistique : une expérience forte.

Cannes Malmaison

jeudi 6 septembre 2007

Chagall, le poète marieur

Le poète de la peinture Marc Chagall n’a jamais cessé de porter son regard d’enfance sur le monde, il puise son inspiration dans l’amour de son village russe toujours présent et protecteur. Il y connut les animaux domestiques. Son père vendait des harengs, son oncle boucher apaisait les vaches d’un mot doux pour l’épreuve de la mort. Il les mélangea à sa culture juive pour peindre toute son expression de l’amour, du couple, de l’acte charnel, du bonheur et de la souffrance. L’humanité des animaux leur donne des bras pour jouer du violon, tenir le chandelier comme figure tutélaire au moment crucial du mariage, symbole de « La vie ». Dans une série d’esquisses, le repas sous le toit de la maison et la lampe, le vagabond, l’union, la fête, l’au revoir sont « La vie ». Le bouc est le peintre exilé et missionnaire. Le coq est le peintre qui va vers le renouveau mais c’est aussi le lit protégé des époux. Le poisson tenant le parapluie est comme le messager de Dieu qui veille. Levé de soleil sur le village, village dans le ventre du coq, couple dans ses plumes, époux-horloge comme Christ-horloge (symbole des juifs sacrifiés) sont poésie de la vie qui passe. Ce n’est que la tendresse, l’espoir, le nid musical, fleuri, animal, de l’unique et première chimère, première figure hybride de Marc Chagall : les époux. On dirait que tout le cœur de Chagall s’est cristallisé dans son ressenti sous la tente du mariage. Et tous les animaux et les anges ne font que veiller sur cet unique moment de fusion comme sur une nouvelle naissance.

Nice, Musée Chagall