jeudi 19 avril 2007

Nice to meet you


C’est l’heure d’une rétrospective des nouveaux talents issus de la niçoise villa Arson. Il y en a beaucoup et une grande feuille conceptuelle vous attend à l’entrée du Mamac. Toutes les expériences touchent, mais la plus forte est un mur fait d’une purée de pomme de terre et de betterave, éphémère, fragile et soyeux, comme les merveilles que la nature nous offre en passant : le fait de savoir que l’œuvre ne durera que pour nos yeux, plonge dans un vertige métaphysique de toute beauté. De même sa « nature molle » englue dans une délicate colle à papier des légumes sur une table ronde. Il y a beaucoup de violence dans cette exposition et aussi une quête de la douceur. Les dessins inspirés du monde de l’enfance et proposant des drames de l’inconscient par Béatrice Cussol en sont un symbole, comme les photographies ambiguës de Jean-Luc Verna, où la dureté gothique d’un corps nu percé, tatoué côtoie l’académisme le plus maniéré, inspiré d’œuvres célèbres. Un film montre un suicide collectif de tous les artistes et semble un orgasme. Philippe Gronon nous propose cannibalisme et vomissures, tandis que Bertrand Lamarche projette en sans giratoire des paysages urbains anonymes sur des personnages banals dont la tragique solitude ressort par ce procédé. Enfin l’ultra blancheur sous une lampe médicale des maisons miniatures et traumatisées de Berdaguer & Péjus nous plonge dans une liqueur ombilicale qui fait écho au basses fréquences de Pascal Broccolichi, inondant toute l’exposition dans la rumeur inquiétante du monde. Même dans les extrêmes de l’abstrait (Cedric Teisseire et Marc Chevalier), l’art exprime toujours les souffrances et les rêves du temps.

Nice, Mamac

vendredi 13 avril 2007

Aimé Maeght, un amateur de génie

Se poursuit l'exposition « dialogue avec le siècle » relatant la vie d’Aimé Maeght, au début petit marchand de tableau dont « l’optimisme grave » a conduit a « l’acceptation de la condition humaine en accompagnateur des artistes ». Nous accueille une lettre d’Aimé Maeght à Rouault, confession ou supplique qui révèle tout son engagement sensible. A elle seule commentaire des dessins, parfois très célèbres, de Giacometti, Miro, Braque, Matisse, Bonnard, Chagall, Léger, Picasso, Childira, et tant d’autres. Plusieurs sont dédiés aux époux « à Guiguitte et Aimé ». Une chambrette reconstituée impressionne avec son mobilier tout improvisé de ces génies. Telle peinture giacomettienne angoissée sans angoisse résumerait le siècle s’il n’y avait eu dans l’exposition une « nature morte aux grenades » subjuguant dans sa nécessaire et ultime lumière. S’inaugure toujours au printemps et à l’automne, dans la grande salle ensoleillée donnant sur une cour aux statues immortelles (là où jouent les enfants en visite), une exposition dédiée aux artistes vivants : le grec Takis est légèreté, verticalité, évanouissement, musique. Deux groupes de fourches suspendent en hauteur les éclats d’obus tel des tulipes ; Au centre de fausses sirènes dont les pavillons flottent, grâce aux électroaimants étonnamment détachés du tronc : l’effet reproduit la stylisation de traits de crayons mais dans la réalité dimensionnelle. On est vraiment ému d’entendre la sonnerie aléatoire et stéréophonique des frêles carillons (plombs de sculpteur) suspendus devant une corde et rythmés par dix grandes et blanches caisses de résonance.

Vence, Fondation Maeght