mardi 30 décembre 2008

Ballets de Monte-Carlo en décembre 2008 : programme 2

Jean-Christophe Maillot
Altro Canto (Part II)

On ne peut pas dénier que Jean-Christophe Maillot accède, pas à pas, au génie. C'est un écrivain du corps désormais, son oeil voit les petits détails qui font la profondeur de la vie pour nous tous et les traduit avec des  images qui resteront dans le patrimoine. Ce n'est pas simplement que le jeu de l'ombre comme thème du ballet soit une idée originale : d'Andersen à Hofmanstahl, l'ombre a su transcrire la bête noire de l'homme. Aussi prendre un écran et jouer en optique des reflets du (des) danseur(s), multiplie le donner à voir avec beauté sans pour autant être tout à fait neuf. Mais ce sont les gestes juxtaposés qui font le génie. Ne nous arrêtons pas aux références simples comme les bras formant une montre, ni la si virtuose petite bête au début que sont les deux doigts gantés de noir du soliste Gaetan Morlotti. Mais allons jusqu'à la main tenant sa propre tête réduite en enfant, sa propre main prenant sa propre main en enfant, tout cela en jeu d'ombre double sur l'écran et aussi en jeu de marionnettiste dans la chair du danseur. Il y a deux femmes larves pour notre Gaetan Morlotti au prise avec ses pulsions, Une, la célèbre Bernice Coppieters, incarne la femme désirée et l'autre, Maude Sabourin, le double de la femme manipulée, rejetée. Et quand trois hommes apparaissent, chacun à deux femmes. Ils sont propices à un déchaînement d'instincts qui aboutit au si dramatique geste de Gaetan Morlotti  : il gratte furieusement le sol pour tenter d'arracher la peau de sa bête noire. Il y a des baisses d'intensité parfois - pas aisé de maintenir un niveau sublime tout au long - mais l'impression est d'un chef d'oeuvre plus grand encore qu'Altro canto (Part I) et d'une subtilité des mouvements qui laisse ému jusqu'au bouleversement de l'âme.

Quant à la musique, elle est de qualité, parfois lyrique comme dans la partie pianiste qui lance presqu'une mélodie. Elle devra toutefois sa survie à la postérité de ce qu'elle reste de collaboration, comme une musique de film; de ce qu'elle puise sa vie dans le ballet même de Jean-Christophe Maillot qui la dépasse de loin. Elle est de Bertrand Maillot. Lien de parenté ?

William Forsythe
In the middle...somewhat elevated

Chef d'oeuvre de 1987, tonique, agressif, d'une vélocité typique d'une époque tigresse, d'une perception impitoyable du temps qui n'est plus la nôtre, dans cette génération où l'avenir de la planète leur appartenait sans questionnement, quand la technique s'affichait... La musique électro-acoustique, sous fond savane des balais percussifs (c'est la sueur fauve des exploits du ballet) est une scansion de chocs de tôles sans répit (c'est l'affront que nous fait la perfection de la machine humaine dansante) : son compositeur Thom Willems ne devait pas être très drôle en ces années là ! Les groupes (pourtant trés classiques) s'affrontent comme les bandes de banlieue et cela donne une parenté (qu'on le veuille ou non, que la comparaison choque ou non) avec le clip Triller : c'est l'époque. L'ambiance rappelle d'emblée les films Rocky, les salles de sport. Les gestes de tension, ces fières séquences dansées, sont vite suivis d'une détente, d'une marche au pas du professionnel au travail : évocation des gestes aux Jeux Olympiques. On admire tout particulièrement Asier Uriagereka et April Ball pour transcrire l'hautaine technicité des personnages du ballet et leur force quasi sexuelle voire bestiale dans l'effort. La sexualité viens aussi que cette danse-sport acrobatique ne se départie jamais de la grâce classique d'où elle est issue, c'est un ballet post classique ouvert sur son époque. C'est surtout un ballet ouvert sur un avenir plus psychologique de la danse.  

Twila Tharp
In the Upper room (première à Monaco)

Que veut dire "in the upper room" est-ce de l'argot ? Est-ce simplement "la chambre du haut". Dans un site internet rock on lit "ça démarre bien, ça monte, ça finit fort". C'est exactement cela, est-ce une attitude positive vers le haut ?
 
Pour exprimer notre ressenti nous allons partir de plus loin. Un conte japonais raconte l'histoire d'un peintre qui fatigué de son travail ne voyait de l'utilité qu'aux autres métiers, il marcha droit sur le mont Fuji sans le voir. Un jour une poétesse se trouvait sur son chemin. Elle lui dit qu'elle contemplait et que l'utilité de son travail ne serait que d'offrir à autrui de vivre le même ressenti face à la brume du matin sur le mont Fuji. Le peintre éprouva alors à nouveau l'envie de saisir ses pinceaux.

Twila Tharp semble offrir 45 minutes de poésie en pyjamas comme une offrande au bonheur optimiste du petit réveil, à moins que ce ne soit l'enthousiasme du temps libre le soir avant de se coucher, ou encore les bonheurs familiaux du week-end à la Fernand Léger : elle fait merveilles d'un simple ressenti. D'où la vélocité de ses danseurs, aussi véloces que ceux de Forsythe (c'est la même époque : août 1986), mais d'un dynamisme moins agressif : dynamisme dans du coton et tout en douceur. Son pas est celui du footing et les bras se lèvent comme pour se laisser porter sur un petit nuage. Le sourire est de mise, du moins pour les danseurs qui savent sourire, c'est le cas de George Oliviera !

La musique est de Philip Glass, c'est une tentation de l'Histoire humaine qui s'est syncrétisée dans ce compositeur. De tout temps la répétition, l'obstination ont fait figure d'incantation. On ne va pas lui reprocher de n'avoir écrit que des chaconnes quand Buxtehude en abusa de son temps. Son inspiration est une séquence harmonique de base minime avec un refus de mélodie. Mais il y a sans cesse une nouvelle harmonie par une note surajoutée, une nouvelle couleur, une nouvelle combinaison des instruments pour capter la bonne volonté de l'auditeur et lui faire attendre la péroraison abrupte de chaque pièce. Ainsi les séries de Warhol donne à chacun sa minute de célébrité, ainsi F.I.A.T. personnalise d'un petit gadget à la carte l'infinité de ses voitures identiques, ainsi à l'ère de l'industrie est la musique minimale  ! Chaque petit moment suivant le goût de chacun.

Le ballet est lui aussi minimaliste, c'est ce petit bonheur personnel qu'il reflète, lui aussi, mille fois : dans la tendresse des groupes qui se forment, dans les micro répétitions, les centaines de combinaisons et enfin la fougue en feu d'artifice quand la voix s'introduit comme ultime instrument de musique, cette voix qui pourrait être le symbole de "chantonner sous la douche le matin" et qui fait efficacement palpiter l'auditeur vers l'acmé finale du ballet.

Une seule critique

Impossible de critiquer la qualité extraordinaire du ballet de Monte-Carlo ! Plutôt il faut féliciter ceux du premier round d'avoir participé au dernier, vu le nombre de gestes difficiles à se mémorer, vue l'énergie psychique puis physique...

Mais en revanche il faut se plaindre de la sonorisation. Si l'oreille saigne pour un seul piano dans Philip Glass, que dire des trompettes et de la contrebasse, ne parlons pas des percussions en crash de voiture de Willems (on comprend qu'à bout de nerf après trois heures pareilles dans "impressing the Czar" au Châtelet, le public se soit révolté). Il faut se plaindre de ce que les sonorisations soient de nos jours si parfaites qu'on en abuse, qu'on enlève le naturel aux couleurs. Il est loin le temps où les Romains mettaient des amphores résonnant à la quinte pour amplifier les voix (cf. Vitruve). Les spectacles n'en étaient pas moins beaux et les lieux étaient aussi immenses. On ne peut pas sortir d'une manifestation aussi superbe avec un mal de tête. Une pétition pour inviter le régisseur du son à être plus raisonnable ?

Un cadeau pour tant de beauté

Puisque ce journal est un support qui a de la place, proposons, comme les anciens, un hommage au talent de Maillot. Ecrire des vers serait démodé. Offrons lui seulement ce beau passage de Xénophon, Anabase. Pourquoi ce passage ? Les mystères de ce que furent les danses du passé n'a d'égal que celui des danses du futur. Maillot est sur cette route.

Début du livre VI de l'Anabase, extrait trouvé sur internet

"Pendant le séjour que l'armée fit dans le camp sous Cotyore, les soldats vécurent, les uns de ce qu'on leur vendait au marché, les autres, de la maraude qu'ils faisaient en Paphlagonie. Les Paphlagoniens, réciproquement, saisissaient l'occasion d'enlever tout ce qui s'écartait du camp ; ils tâchaient aussi de faire quelque mal la nuit aux Grecs qui s'étaient baraqués un peu loin des autres. Ces hostilités augmentèrent l'animosité mutuelle de ce peuple et des soldats. Corylas, qui se trouvait alors commander en Paphlagonie, envoie aux Grecs des députés, montés sur de beaux chevaux, et vêtus d'habits magnifiques ; ils annoncent que Corylas est disposé à ne plus inquiéter l'armée, si elle respecte elle-même le pays. Les généraux répondirent qu'ils en délibéreraient avec elle, et donnèrent l'hospitalité aux députés. Ils appelèrent aussi ceux qu'il parut le plus convenable d'inviter ; puis ayant immolé aux Dieux des boeufs et d'autres bestiaux qu'on avait pris, on servit un assez beau repas ; on soupa couché sur l'herbe ; et l'on but dans des coupes de corne, qu'on trouvait dans le pays. Quand ou eut fait les libations et chanté le péan, des Thraces se levèrent d'abord et dansèrent tout armés au son de la flûte ; ils sautaient légèrement et s'élevaient fort haut ; ils tenaient en main leurs sabres nus, paraissaient s'en servir et combattre. Enfin l'un des danseurs frappa l'autre, et tout le monde crut qu'il l'avait tué ; mais c'était un artifice innocent. Les Paphlagoniens jetèrent un grand cri. Le vainqueur dépouilla son adversaire des armes qu'il portait, et sortit en chantant Sitalcès. D'autres Thraces emportèrent le vaincu comme mort ; il n'avait cependant pas reçu le moindre mal. Ensuite les Aenians et les Magnésiens se levèrent et commencèrent, revêtus de leurs armes, une pantomime qu'on appelle la danse des semeurs ; en voici la description : un des acteurs met ses armes à terre à côté de lui, sème ensuite un champ et conduit une charrue, se retournant souvent, comme un homme qui a peur qu’un voleur s'avance vers lui ; l'autre, dès qu'il l'aperçoit, saute sur ses armes, court au voleur, et se bat contre lui pour défendre ses boeufs : tous les mouvements se faisaient en cadence, au son de la flûte. Enfin le voleur a le dessus, garrotte le laboureur et emmène son attelage. D'autres fois le laboureur était victorieux ; il liait au voleur les mains derrière le dos, l'attachait à côté de ses boeufs, et le faisait marcher ainsi devant lui.

Un Mysien entra ensuite sur la scène ; il tenait, dans chacune de ses mains, un bouclier léger ; quelquefois il s'en servait en dansant, comme s'il eût eu à se défendre contre deux adversaires ; quelquefois, comme s'il n'eût eu affaire qu'à un seul. Souvent il tournait et faisait le saut périlleux sans lâcher ses boucliers : c'était un spectacle agréable qu'il donnait ; il finit par danser à la manière des Perses ; frappant d'un bouclier sur l'autre ; il se mettait à genoux, se relevait, et exécutait tous ces mouvements en mesure et au son de la flûte. Des Mantinéens et quelques autres Arcadiens se levèrent ensuite, et parurent après lui sur la scène ; ils étaient couverts des plus belles armes qu'ils avaient pu trouver ; ils s'avancèrent en cadence, les flûtes jouant une marche guerrière ; ils chantèrent le péan, puis dansèrent comme dans les cérémonies religieuses. Les Paphlagoniens qui étaient présents, s'étonnaient de ce que toutes les danses s'exécutaient par des hommes armés de toutes pièces. Le Mysien, qui vit leur surprise, ayant engagé un des Arcadiens à permettre qu'on fit paraître une danseuse qu'il avait pour esclave, l'habilla le plus élégamment qu'il put, lui mit à la main un bouclier léger, et la fit entrer ; elle dansa légèrement la pyrrhique : on lui donna beaucoup d'applaudissements. Les Paphlagoniens demandèrent aux Grecs si leurs femmes combattaient avec eux. On leur répondit que c'étaient elles qui avaient repoussé le Roi du camp lorsqu'il était venu piller les équipages. Telle fut la fin des amusements de cette nuit."

(le Roi dont il est question est Artaxerxès qui venait de tuer son frère Cyrus pour qui les grecs étaient mercenaires. Quant aux femmes qui repoussèrent le Grand Roi du camp des grecs, il s'agit d'une exagération de l'attitude d'une des deux courtisanes de Cyrus, la milésienne, qui préféra fuir grâce aux grecs plutôt que tomber sous la main d'Artaxerxès.)


dimanche 28 décembre 2008

Contes & dialogues de Cédric (IV) : les aventures du capitano et de l'ornithorynque

EN CONSTRUCTION !! CE TEXTE N'EST PAS ENCORE DU TOUT BON, je vais le modifier totalement et le finir au mois de mai 2011, on saura enfin comment le capitano s'est débrouillé dans le m2tier de pinguin ranger. J'invite les lecteur à passer aux textes plus anciens...









Ce conte en trois parties pourra servir à un auteur de bande dessiné. (c'est un reve mais jusqu'ici pasd de desisnateur) Il est dédié à Béranger Cases et Cathy Serrano, mais il est aussi un maritime hommage au commandant François-Régis Cloup-Mandavialle dont j'ai encore perdu pour une troisième fois (c'est une fatalité !) le numéro de téléphone et à qui je ne peux pas souhaiter les voeux, j'aurais ainsi la preuve matérielle de les avoir donnés via internet ! Il était un capitaine de bateau tout bleu qui était particulièrement grand, avait les épaules carrées et les poumons puissants, il était fin costaud et fin musclé, son visage exprimait la gravité, la virilité, la puissance taillée au couteau mais quiconque regardait au plus profond de ses yeux vert d’eau pouvait y lire la pureté, l’innocence, l’amour. Or sa plus fameuse particularité était d'avoir une peau bleue qui en bronzant pouvait revêtir une teinte émeraude. Il avait aussi une grande, large et épaisse massue dont il se servait pour quelque action de héros, de guerrier, de justicier, car il était doté d’une force surhumaine, aveugle et brutale. Or il était maladroit au début de ses exploits, cela venait qu’il fut longtemps matelot mousse chez les pirates et qu’on lui fit une éducation rugueuse tout en l’y couvant comme un petit poussin : le chef l’avait adopté, l’ayant recueillit au bord de l’écume de la nageoire de quelque poisson chirurgien. Un jour son père adoptif lui dit : Va pirater de par le monde : avec tous ces biscotos que tu as, cela ne sera pas difficile. Un jour qu’il plongeait dans l’eau il sentit sa massue toute lourde : Le capitano - Qu'est-ce donc qui s'agrippe ? je verrai ça tout à l'heure : il y a plus pressé à l'horizon, je vois enfin un crocodile : je vais l'assommer comme un trophée ! Il lève sa massue, va pour frapper, mais à la place de la massue (et c'était cela le poids) notre capitaine brandissait un ornithorynque L'ornithorync au crocodile - Je m'appelle Platypulus et j'ai un regard si doux, si doux, ah ! si doux... Le crocodile - J'ai le coeur attendris, attendris, ah trop attendris ! Suis-je un crocodile ? un moineau ? J'ai du coton dans les dents ! Comme mon coeur est gros et grand ! J'ai les larmes qui me montent et je me fais de la bile ! Platypulus (c'est le nom de notre ornithorync) - Pleure, pleure, ah pleure ! c'est ta nature profonde ! Et le crocodile retourne sagement à l'eau sans essuyer de coup violent, aucun ! sans lutte, dans l'amour et la paix. C'est à cause du regard magique de Platypulus. Le crocodile - Peace and love... Le Capitaine très en colère - Comment moi ne pas frapper ne pas combattre, ne pas abattre ! (regardant méchamment l'ornithorync) un chien saucisse moitié canard me vole ma proie ! au lieu de gloire, on ira clamer ma honte ! Va-t-en vile bête, n'ose plus devant moi montrer une tête immonde, avec des yeux : ouh ! Et d'un violent coup de pied, il jette loin de lui l'animal étrange, l'ornythorynque Platypulus ! c'est lui qui a un bec de canard même si c'est un mammifère primitif !



Et marchant d'un pas agacé, capitaine-massue s'éloigne vivement, tandis que le doux mammifère primitif, tel un destin, le suit tout de même, les yeux remplis d'amour. Le capitaine marchait tant et tant, naviguait tout autant et tomba sur une île paradisiaque. Le ciel était bleu, la mer émeraude. Mais le capitaine avait toujours en lui cet énervement d'autant qu'il était ereinté sous le soleil frappant, au milieu du sable...






Le Capitaine - Quelle chaleur !






... il se retourna et vit bien que l'ornithorynque le suivait toujours



Le Capitaine - Mais lâche moi les tongues ! Le mammifère primitif le regardait encore plus triste encore plus doux. Alors ce fut la crise de nerf : Horreur ! sacrilège ! Voyez : un malheureux rocher en fit les frais, pulvérisé sous la massue du Capitaine ! Toujours là, l'animal gonosomé dispendait toujours son regard pur ; fatigué, le capitaine s'était assis sur la plage. Le capitaine - Je vois bien bien que désormais il n'y a plus rien à faire pour me débarrasser de ce joli petit monotrème ! Chouette, quelle aubaine ! Platypulus se met vite dans les grosses mains du capitaine pour se faire caresser. Mais des pas étranges attirent soudain leurs attentions ! Un troupeau de fantôme de dinosaures passe là sur la plage, laissant des empruntes belles jusqu'au plus lointain de la perpective. Puis voici des poissons coureurs qui vont dans tous les sens à trois cent kilomètres heure. Les poissons en sifflant - Prenez garde ! Le capitaine à Platypulus - Viens ! Et ils plongent dans les profondeurs marines pour rejoindre un volcan marin. Une armée de Nautiles les entraînant dans un tourbillon de vapeur. Les nautiles - Vous êtes en état d'arrestation ! Le Capitaine - Pourquoi ? Les nautiles - Vous le saurez quand vous comparaitrez devant notre chef Dark Trilobite. Dark Trilobite était tout vieux, au moins 380 millions d'années. Sa date de naissance c'était l'ère du dévonien, quand il y avait plus d'animaux dans la mer que sur terre. Il avait été gentil dans sa jeunesse, mais un coup d'astéroïde sur la gueule l'avait rendu méchant, irascible, maudit pour l’éternité. Comme il n'avait plus de repos, il était devenu un chef cruel. Dark Trilobite - Tu as détruit la roche sacrée de l'île de Lifou tu as brisé notre tabou : tu seras puni de la façon que voici, façon tripartite : touche l'un de mes trois lobes gluants - c'est de là que me vient le nom de trilobite - et tu choisiras toi même selon le hasard la malédiction qui te frappe : maladie mentale, maladie physique, handicap Le Capitaine enfonçant son doigt dans le lobe de gauche - Beuh, c'est gluant et tout mou ! Dark trilobite - Une chance pour toi, c'est le handicap que tu subiras, il en existe un millier que amoindrissent chaque jour ton voisin mes trois lobes t'en proposent quelques uns : paraplégie, amputation, nanisme, tu choisiras ! Le Capitiane enfonçant son doigt dans le lobe du milieu - Beuh, c'est gluant et tout mou ! Dark trilobite - C'est le mieux pour toi, tu seras nain, plus petit que mon pouce, tu seras le maillon faible, un petit mousse ! Platypulus - Non, pas ça à mon capitaine ! Mon gentil capitaine, si gentil ! Platypulus attendrira-t-il Dark trilobite par son regard magique ? Les nautiles - Quel suspens ! Dark Trilobite - Pas de chance, cela ne sers à rien que tu zieute, monotrême ridicule



ta magie s'annule



les ans m'ont rendu aveugle ! Tandis que Platypulus se lamentait, le capitaine rétrécissait. Par fortune, Dark trilobite vieux et aveugle, n'eût pas le loisir de parachever son oeuvre, et le capitaine tout petit petit qu'il était devenu restait parfaitement proportionné et séduisant. Platypulus - Dark Trilobite, comme j'ai échoué à sauver mon ami du sort terrible veille à me faire partager sa destiné à part égale ! Dark Trilobite Minus, tu veux une méchanceté entière ? J'exècre les anges de lumière ! non seulement tu rétrécieras



mais ton arme, ton regard loquace,



aussi doux soit-il, il sera inefficace tel est mon sortilège, petit rat ! Quant à toi, capitaine-massue,



maintenant que te voilà tout menu ton nom sera désormais Capitano et ta massue une brindille, je sais c'est pas beau,



je t'étrille !



j'en ris, j'en ris très gras



tel est mon sortilège, ingrat ! Les nautiles - Fuyez ! Notre chef lance contre vous une attaque de moustique ! Platypulus - Cachons nous dans la mangrove ! Un tricot rayé, voyant le Capitano - Que cet écrevisse bleue me semble appétissante Un bernard l'hermite, voyant Platypulus - Mon bébé ! Une étoile de mer brune et baudruchée, voyant le capitaine - Je ferrais bien mon époux de ce craquant Capitano Une étoile de mer bleue électrique - Ah non ! mégère, il est à moi ! tu veux toujours tout me prendre : tu vois bien qu'il a la même couleur que moi ! (s'adressant au Capitano) Mon beau ! nous sommes fait l'un pour l'autre ! Une troisième d'une autre couleur - Tu verras quand je l'aurais enserré dans mes bras en peau de doudou Le Capitano - Je vous assome toutes de ma massue ! Un Kanak -Aïe mon doigt est coinçé... Merci petit homme ! tu m'as sauvé de la marée montante Le capitano - De rien ! Les moustiques - Bzzz, Capitano repéré quatrième mangrove à gauche à l'attaque Mais comment vont-ils s'en sortir ? Les petites étoiles de mer couleur sable en parlant lentement - Nous, on va leur apprendre l'art de se camouffler lentement dans le sable il suffit de se blottir dans les milliers de traces qu'on a laissé jusqu'à l'horizon couchant personne n'y distingue plus rien qu'une mosaïque d'étoiles et la mer et le ciel prolongent les étoiles.



Platypulus & le Capitano - Merci bonnes fées ! Les moustiques - Bzz, où sont-ils maintenant ? Platypulus au Capitano - Là, une demi noix de coco échouée, ce sera notre radeau ! Et voilà comment le capitano à toute vitesse s'enfuit de l'île en compagnie de Platypulus, ramant de ses petits biscotos dans une noix de coco Les moustiques - Mission échouée. Ouff ! mais que de danger pour un si petit bonhomme !






FIN DE LA PREMIERE AVENTURE, COMMENCEMENT DE LA DEUXIEME.



Voilà qu'au milieu de l'océan un requin marteau rencontra le capitano et platypulus. C'était un sage et non pas un vaurien, le capitaine n'eut pas à se servir de sa massue, et c'était d'ailleurs une chance qu'il n'eût pas rencontré les méchants requins qui pullulent de par tout le pacifique dans la petitesse où il se trouvait. Le Capitano - Ah si j'étais fort et grand, j'aurais là un adversaire remarquable ! Le Requin Marteau - De par tout le pacifique pullulent les méchants et de par toutes les armes il faut lutter pour survivre, une chance que minus comme tu es, c'est sur moi que tu tombes, j'ai à te dire ton avenir mais considère tout d'abord que tu ne dois plus chercher à frapper inconsidéremement et réfléchi mieux sur la manière de tes capacités Le Capitano - Parle vieux sage Le Requin Marteau - Soit : tu retrouveras ta taille adulte, ta force surhumaine, ce jour où tu rencontreras la communauté d'animaux animée par le seul sentiment de l'amour. Vas ton chemin, ai confiance, apprends à te maîtriser toi-même. Il dit, et drappé dans la dignité de son nez monumental, il tourna le dos pour s'en aller Quand ils arrivèrent sur la terre ferme à force de ramer dans leur frèle embarcation, voici qu'un oiseau gris au plumage arrogant les reçus farouchement. Le Kagou ouvrant très grande sa huppe pour impresionner - Qui êtes vous pour venir envahir mon pays ? je le défendrais, dussé-je périr, les Kagous sont ainsi, ils vont jusqu'au bout Le Capitano -Tu es fier comme artaban moi je suis vaillant Le capitaine pris un coquillage et s'en servit comme épée pour escrimer avec le bec de l'oiseau. Le combat fut acharné toute une heure, il n'y eut pas de gagnant. Fatigués les deux adversaires s'écroulèrent, ils s'assirent l'un à côté de l'autre, et le Capitano poussant machinalement des cailloux dit : Le Capitano - Il n'y aurait pas du danger par hasard ici ? Le Kagou - Ouh mon bon Monsieur, moi je ne vous le dis pas ! je ne vous dis pas qu'il n'y a pas des requins partout ! on est dans le pacifique ! d'ailleurs, si vous me le permettez, je vais vous racconter une petite anecdote : avec ma fille on est allé cueillir les coquillages sur la grande barrière, ils y son très gros, mais moi qui suis un fils du pays pourtant je n'osais pas aller au delà de la patte dans l'eau ! vous voyez pas que je me fasse manger moi ! dernièrement on a vu une touriste se baigner là où vous êtes et elle s'est faite dévorer : je ne vous dis pas qu'elle a respecter les tabous ou pas, je ne suis pas du genre à y croire, mais il faut respecter, on sait jamais ! Non mon bon Monsieur, je ne vous dis pas qu'il n'y a pas de danger ! Le Capitano - Et sur terre, il y a du danger ? Le Kagou - Ouh mon bon Monsieur, moi je ne vous le dis pas ! d'ailleurs, si vous me le permettez je vaus vous raconter une toute petite anecdote.... Le Capitano - Je préfère avoir la surprise ! Le Kagou - Tu es brave mon bon Monsieur ! alors je te laisse le passage et serai-là un jour pour t'aider Et le Kagou s'en alla. Capitano arriva à Boulouparis, ville du troisième millénaire, une grande banderole annonçait la fête du cerf, de la crevette, de l’écrevice et du petit poussin. Le Capitano Platypulus, regarde, c'est certainement eux la communauté douce qui me rendra ma taille, un poussin c'est tout plein d'amour ! Platypulus - Du pain marmitte ! j'ai faim, si faim, faim ! Le Capitano - On cuit des saucisses ! malheureusement elles sont trop grosses pour moi !






Platypulus - hum du bon bougna ! Miam c'est bon tous ses féculents ! Le Capitano - Fais gaffe, vlà un acarien qui te pique ton igname ! Alors au milieu de la fête, acclamé de tous, surgit le poussin. Il avait un casque de mineur sur la tête, et l'on voyait bien que c'était lui le chef, qu'il dominait le groupe. Il dit : Poussical examinant le Capitano -Mâtez moi ce minus Tâtez un peu ses muscles ouvrez lui la bouche que je vois si ses dents sont en bonne santé c'est signe de résistance. Ok, ça me convient, Cerf emprisonne le dans tes branches c'est ta nouvelle maison, Minus : désormais tu piocheras le sol pour extraire du nickel à mon compte, je compte bien avoir plus de rendement avec toi qu'avec ces fénéantes de crevettes et écrevices. Le Cerf - Bravo Poussical, foi de Cerf, t'as fait un bon coup ! T'es le plus fort ! Poussical - Mouais, je m'aime trop ! Mais m'appelle pas Poussical, appelle moi Chef ! Le Cerf - Je t'admire chef Poussical - Cause pas quand on t'demande rien Ecoutez moi tous je suis trop fort ! Qui c'est qui a le plus gros 4x4 ? c'est moi ! qui c'est qui fait du tunning le plus fort le dimanche ! c'est moi ! Le Cerf - C'est toi qui a les plus grosses baffles ! Je t'amire chef ! Poussical - Mouais, combien de fois je te le répète ? cause pas quand on t'demande rien. Et c'est encore moi qui tiens ce minus costaud comme esclave maintenant j'm'aime trop ! Et Voilà Capitano qui se retrouve esclave mineur à fouiller la terre rouge pour ce vilain capitaliste de Poussical dont l'entreprise prospère sur le dos des autres. Le capitano dans sa prison chuchotant à platypulus Piu, più ! Platypulus non Più piu ! t'as pas d'oreille ? Le capitano soupirant Je suis fatigué ! tous les jours il me conduit assis sur son coussin, vindicatif, agressif, et toujours cette zic à fond dans la voiture : du rap ! et les cornes de ce cerf qui dors tout le temps et qui m'emprisonnent ! et tout ce nickel vert et cette terre, je suis tout rouge ! Platypulus Tout violet puisque la peau bleu plus le rouge ça fait de l'indigo Le capitano` C'est pas le moment de faire de l'esprit Platypulus Quelqu'un vient, je fuis, je reviens tout à l'heure ! L'une écrevisse Rappe-moi un peu le dos avec ta mandibule, je suis toute mouillée ! L'autre écrevisse Oh oui ! je te grappe toutes tes pattes ! L'une écrevisse Hihihih ! L'autre écrevisse Tu crains les chatouilles ! L'un écrevisse Oui comme le chef ! hihihihi ! ça le déconcentre, mais chut il faut pas le dire ! L'autre écrevisse Il aime pas avoir des défaut, giligli ! Le Capitano Bah ! Tu m'as bavé dessus Tu peux pas dormir la bouche fermée le Cerf ! Les écrevisses On parle ! fuyons Platypulus Più piu ! Le Capitano Più piu ! Platypulus Bravo, tu es au point Le Capitano Et mes yeux sont assez doux maintenant Platypulus T'enseigner n'était pas un mince affaire, mais je crois que tes yeux sont capables d'amollir les plus coriaces méchants désormais. Mais chut ! il ne faut pas que le cerf nous entende ! Le Capitano Alors c'est pour demain Platypulus Le problème c'est qu'il ne regarde personne. Même si tu piupute bien et lui fait croire à quelque possine, comme lui faire croiser ton regard ? Le Capitano Les deux écrevisse de tout à l'heure m'ont donné la solution, il suffitde le chatouiller ! Platypulus Feu vert pour demain donc ! Dans le cul de la baleine ! Le Capitano Qu'elle en crève ! Platypulus Dès que tes yeux le fixerons, ses yeux se ramolliront que votre entrevue soit effectivement une entrevue ! tu l'auras ! Le Choeur Et le matin Capitano Più piu ! Poussical attiré par le leurre Piu più ? Capitano Giligili Poussical hihihi ! Le Coryphée Et comme un petit poussin est avant out un enfant : Poussical Je veux ma maman Le Choeur Il l'avait en effet délaissée dès sa naissance pour faire du commerce Le Choryphée Libéré spontanément de son esclavage, le Cerf redressa sa tête pour retourner à ses paturages Le Cerf Ouf, on ne me mangera pas dans cette histoire ! Le Choryphée les crevettes et les écrevisses retournèrent à l'océan Le Choeur Et la ville de Boulouparis est fière de ce jour de fêter cet événement chaque année.

Adaptation 2 : l'Epopée de Gilgamesh version théâtre avec texte quasi exhaustif

Que les grands savants pardonnent ce travail d'assimilation, en espérant que la vie me donne d'être un jour aussi assyriologue et déterrer des sables apaisés les lacunes du texte. L'édition Bottero et celle du Moyen-orient sont a base de ce travail.


Tablette I

Sur les remparts d’Uruk

Urshanabi à un enfant

Regarde ! C’est lui qui fit édifier les remparts d’Uruk, la ville aux enclos, et ceux du haut temple, l’Eanna. Regarde cette muraille, avec sa frise, c’est un filet d’oiseau ! Considère ce soubassement : personne ne peut l’imiter ! Palpe la dalle du seuil de la porte de la cité : on l’a apportée de si loin ! Avance toi vers le temple, l’Eanna où réside Ishtar la déesse obscure : nul roi n’a pu le contrefaire ! Monte pour déambuler sur le rempart d’Uruk ! Scrute les fondations, contemple le briquetage : n’est-ce pas de la Brique cuite ? Les sept sages que le Dieu intelligent Ea, créateur de l’homme, envoya au monde, n’en ont-ils pas jeté les bases ? Regarde le panorama ! Vois les trois cents hectares de villes, autant de jardins, autant de terres vierges, territoires du temple d’Ishtar ! Avec ses mille hectares, tu couvres du regard l’entier domaine d’Uruk.

Va maintenant, cherche la cassette en cuivre enfouie sous les fondations, manœuvres-en l’anneau de bronze, ouvres-en le volet secret, et tires-en la tablette de lapis-lazuli, pour y déchiffrer comment c’est lui Gilgamesh qui a traversé tant d’épreuves !

L’enfant va chercher la tablette, il lit, assis en tailleur 

Je vais vous présenter le grand homme qui ne voulait pas mourir, le grand homme qui a tout vu, tout exploré, la terre entière et ce qui est caché. Je vais vous présenter celui qui a contemplé les mystères et qui nous a appris ce qui se passait avant le Déluge, celui qui de retour de son lointain voyage, exténué mais apaisé, a gravé sur une stèle tous ses labeurs.

la scène change. Voilà les dieux à la création de Gilgamesh, le peuple y assiste.

Le Peuple

Exceptionnel monarque, preux rejeton d’Uruk, Buffle qui rue sur tous avec ses cornes ! Tu es l’entraîneur de ton peuple, tu précèdes les tiens ; tu es le renfort de ton peuple, tu suis les tiens, puissant filet de guerre, protecteur de tes troupes, violent raz-de-marée qui démolit les murs de pierre ! tel es-tu, fils de Lugalbanda, Gilgamesh à la force totale. Enfant de la Vache sublime, Ninsuna-la bufflesse, tel es-tu Gilgamesh, parfait, éblouissant, toi qui ouvrit les passes des montagnes, creusa des puits sur la nuque des monts, passa la mer immense jusque là d’où sort le Soleil. Toi qui explora l’univers entier en quête de la vie-sans-fin. O Gilgamesh, toi qui poussa jusqu’à la demeure d’Utanapisti-le-lointain, le vieux héros qui restaura les sanctuaires qu’avait anéantis le Déluge, entre tous les hommes, qui peux rivaliser avec toi, Gilgamesh, en souveraineté et déclarer : « Le Roi, c’est moi seul ! » ?

Enlil

Gilgamesh dès ta naissance sois immense ! Qu’Ea mon conseiller y veille. Gilgamesh : Dieu aux deux tiers, pour un tiers homme.

Mah

Sublime complice d’Ea, je suis son conseil : que la forme de ton corps soit harmonieusement dessinée. Je t’agence une figure belle. Que tes joues soient barbues comme celles du grand Dieu Enlil, que les touffes de ta chevelure soient drues comme celle de la déesse des épis d’orges.

Shamash

Que tes muscles soient de la plus grande vigueur tel le géant qui soutien l’ordre cosmique.

Dieu de l’orage

Que l’héroïsme impétueux exalte ton coeur

Ea

Moi même dans mon intelligence suprême je parachève ta haute taille, toute élancée ! Sept mètres de hauteur, l’extension de tes bras : six mètres, ta poitrine en largueur : deux mètres, ton torse : trois mètres, ton pied : un mètre et demi, tes jambes : trois mètres et demi, un demi mètre le premier de tes doigts.

Les gaillards d’Uruk

Dans l’enclos d’Uruk il va, il vient, tête haute, ce buffle. Il étale sa force, il est sans pareil pour brandir les armes. Nous l’escortons, toujours attentifs à ses ordres, toujours sur pied, nous sommes des maillets prêt à frapper la boule. Hélas ! Tous en privé, nous ne cessons de trembler. Chaque jour il tyrannise les hommes d’Uruk, les provoquant dans des combats rituels. C’est pour rivaliser avec eux, mais il les tue sans le vouloir, trop de force est en lui.

Les filles d’Uruk

De même chaque jour Gilgamesh épouse les filles du pays, trop d’amour est en lui.

Tous en pleurant vers les Dieu

Gilgamesh ne laisse pas un fils à son père, jour et nuit avec arrogance, il les provoque, les vainc et les tue. Gilgamesh ne laisse pas une adolescente à sa mère, fut elle même déjà promise !

Les dieux célestes interpellant Anu Dieu d’Uruk

N’est-ce pas toi qui a mis en place Gilgamesh, ce buffle arrogant, avec son escorte toujours sur pied à ses ordres ? Il ne laisse pas un fils à son père, pas une fille à sa mère ! 

Les dieux célestes interpellant Aruru, la grande Déesse Mère :

Toi qui a formé l’Homme, forme à présent sous la dictée d’Anu un rival à Gilgamesh ! Forme un rival bâti sur le patron de l’ouragan ! Lui et Gilgamesh s’empoigneront et Uruk retrouvera le calme !

Aruru

Qu’il en soit ainsi, toi Anu pénètre moi de ta dictée.

Elle se lave les mains, prend un bout d’argile, crache dessus et le dépose dans la steppe.

Une gazelle

Enkidu le preux, éveille toi ! tu viens d’être mis au monde en la solitude. Regarde toi dans le point d’eau : tu es comme le météorite, un bloc géant, le bloc de Ninurta dieu guerrier ! Abondamment velu par tout le corps ! Scrute ta chevelure de femme avec des boucles foisonnant comme un champ d’épis.

Enkidu

Où suis-je ? pouquoi suis-je seul ?

Les gazelles

Tu ne connais ni concitoyens, ni pays. Regarde–toi dans le point d’eau, tu es habillé comme Sumuquan, dieu des sauvages. Viens avec nous et broute l’herbe en notre compagnie, bois de notre eau, nous savons où sont les aiguades.

Le chasseur apeuré

O Dieux, qu’est-ce au bord de l’eau ?

Il s’en va et revient – deuxième jour

Le chasseur, gorge serré

O Dieux, la peur m’est entrée au ventre !

Il s’en va et revient – troisième jour

Le chasseur, blême

O Dieux, comment puis-je desserrer mes lèvres ?

Le chasseur à son père

Mon père, il y a un gaillard venu du désert : c’est le plus fort du pays, le plus vigoureux, sa musculature est aussi large qu’un bloc tombé du ciel ! Constamment il vagabonde dans le désert ; constamment il broute avec sa harde ; il hante constamment les abords du point d’eau, j’en ai tant peur que je ne l’ai pu approcher ; il a comblé les fosses que j’ai moi-même creusées pour faire des pièges à attraper les bêtes ; il a arraché les filets que j’avais tendus et détourné de moi gros et menu gibier ! Il ne me permet plus de battre la steppe !

Son père

Mon fils, à Uruk demeure Gilgamesh, personne n’est plus fort que lui ; sa musculature est aussi large qu’un bloc tombé du ciel, va le trouver et va l’informer de la vigueur de cet être humain ! 

Le chasseur mettant pied en Uruk

Ecoute-moi, Gilgamesh, dit-il, prête l’oreille à mes paroles : il y a un gaillard venu du désert, il est très fort, c’est le plus vigoureux du pays, sa musculature est puissante comme le météore qui tombe du ciel, constamment il arpente le désert, constamment il broute avec sa harde ; il hante constamment les abords du point d’eau. J’en ai si peur, j’en ai si peur que je ne l’ai pas même approché ! Il a comblé les trappes que j’ai fais pour les bêtes, il a arraché les filets que j’ai tendus, il a détourné de moi gros et menu gibier, il ne me laisse plus battre la steppe ! 

Gilgamesh

Va-t-en Chasseur, et emmène avec toi la courtisane, Lorsque la harde arrivera à l’eau, cette femme ôtera ses vêtements, elle dévoilera ses charmes, et quand il la verra ainsi, il se mettra à l’aimer, alors sa harde, élevée avec lui, lui deviendra étrangère !

Le Chasseur avec la courtisane au point d’eau

Nous sommes arrivés au bon endroit, cache-toi en ce coin, restons un jour, deux jours, aux bord de l’eau.

Arrive la harde et Enkidu qui boivent.

Le chasseur

Le voilà ! dénude toi, découvre tes charmes qu’il vienne y puiser son plaisir et n’aie crainte de l’exténuer en lui prenant son souffle par un long baiser ! Lorsqu’il te verra ainsi, il bondiras sur toi, laisse alors choir ton vêtement pour qu’il s’allonge sur toi et fais lui, à ce sauvage, les caresses féminines ! Alors sa harde, élevée avec lui, elle lui deviendra étrangère, pendant que de ses mamours il te cajolera !

La courtisane

Je n’aies pas de crainte à oser l’exténuer !

Quand elle laisse choir son vêtement, Enkidu s’allonge sur elle. Six jours et sept nuits.

Enkidu

Lajoyeuse, permets, permets que je sois soûl de faire ainsi l’amour et laisse moi me disposer à rejoindre ma harde.

A la vue d’Enkidu, les Gazelles s’enfuient, et les bêtes sauvages s’écartent de lui.

Enkidu pleurant

Mon corps est vidé de force, je ne peux le remuer, je ne peux m’élancer, mes genoux sont trop paralysés pour talonner mes bêtes.

La Courtisane

Tu es beau, Enkidu ! Tu ressembles à un dieu ! Pourquoi galoper en la steppe avec les bêtes ? Laisse moi t’emmener à Uruk aux enclos, à la Sainte Demeure, résidence d’Anu et d’Ishtar, l’Eanna, là où se trouve Gilgamesh, ce héros à la vigueur totale ! Gilgamesh qui pareil à un buffle l’emporte sur les plus gaillards ! 

Enkidu

Oui ma joyeuse !

La Courtisane

Vois comment tu reviens t’asseoir auprès de moi, comment tu tournes tes beaux yeux sur mon visage, combien tu comprends maintenant mes paroles : oui Enkidu, tu es ramolli, incapable de courir comme avant, mais tu as mûri : l’intelligence te pénétre, tu es devenu intelligent, Enkidu ! Toi Enkidu, qui ne savais pas vivre, je te montrerai Gilgamesh cet homme imperturbable ! Tu l’aimeras comme toi-même ! Déjà tu pressens dans mes paroles un ami. Tu le regarderas et tu verras en face combien dans la force de l’âge, il est bien fait ! Combien il a de la prestance ! Combien il respire la séduction par tous les morceaux de sa peau ! Combien il l’emporte sur toi en vigueur ! Il est infatigable, jour et nuit ! Mets de côté ta hargne, Enkidu : ce Gilgamesh, Samash l’a pris en affection et Anu aussi. Enlil le chef des dieux lui a dilaté l’intelligence et Ea, l’ami d’Enlil, aussi fidèle qu’une épouse et le plus malin des dieux, lui a dilaté l’intelligence !

Enkidu

Allons ! Entraîne moi à la Sacrée Demeure, le temple d’Eanna, là où se trouve Gilgamesh ! S’il l’emporte sur les plus gaillards je me mesurerai avec lui et la lutte sera sévère ! Moi, je proclamerai en plein Uruk : le plus puissant c’est moi ! Une fois entré là bas, je changerai le cours des événements ! Moi, cette ébauche d’homme, née de la steppe, Enkidu, je serais le plus vigoureux des héros ! 

La Courtisane, caressant Enkidu

Viens, partons ! Allons le trouver en personne. Je te montrerai Gilgamesh, car je sais où il est. Viens ! Enkidu, viens à Uruk aux enclos. A Uruk les gaillards ont des ceintures faites avec de belles écharpes. A Uruk, chaque jour on fait la fête et les tambourins ne cessent de retentir ! A Uruk les filles que l’on paie pour avoir leur amour sont si belles et pleines de cris de l’amour que les hauts personnages les rejoignent en quittant leur lit nocturne. Elles sont les plus excellents fruits de la finesse d’Uruk, ses filles ! Viens voir les briques des remparts d’Uruk, n’est pas de la brique cuite ? Quelle perfection de l’art à Uruk ! Viens loin de la steppe dans la ville d’Uruk !

Gilgamesh en la Ville d’ Uruk se réveillant 

Ma mère, voici le rêve que j’ai fait : au cours de la nuit, j’allais et venais entouré de mes hommes et en présence des étoiles célestes. Alors un météore est pesamment tombé du ciel près de moi, il avait l’apparence d’un prostitué mâle. J’ai voulu le soulever : il était trop lourd pour moi ! j’ai tenté de le déplacer ; je ne le pouvais remuer ! Devant lui se tenait la population d’Uruk, attroupée tout autour. Le peuple se pressait devant lui : les gaillards, comme à un bambin lui baisaient les pieds, moi je le cajolais, comme une épouse. Puis je l’ai déposé à tes pieds et toi tu l’as traité à égalité avec moi.

Ninsuna la bufflesse

Les Etoiles célestes : c’est ton escorte ! Ce météore trop lourd pour toi et que tu ne pouvais remuer, ce météore que tu as déposé à mes pieds : c’est un compagnon puissant qui va t’arriver. Il est secourable, solide et comme une épouse, il ne t’abandonnera jamais. Les gens le serreront dans leurs bras et tu me l’amèneras. Ton rêve est excellent et du meilleur augure !

Gilgamesh se rendors puis se réveillant à nouveau

J’ai fait un autre rêve ! Le nez en l’air, j’arpentais les rues d’Uruk les enclos, une hachette avait été posée là. C’était un objet d’attention générale. Tous se pressaient pour la voir. Elle avait un aspect singulier cette hachette, elle me plaisait, elle était recouverte des couleurs qu’arborent les prostitués mâles. Sur mes genoux je l’ai aimée, je l’ai cajolée, je l’ai étreinte comme une épouse et je l’ai mise à mes côtés. Et toi tu l’as traité à égalité avec moi. 

Ninsuna la bufflesse

La hachette que tu as vue, ô homme et que tu as étreint comme une épouse et que j’ai traitée à égalité avec toi, c’est un compagnon puissant, secourable, solide comme un bloc ! 

Gilgamesh

Ah ! Qu’il m’arrive une chance aussi grande, un tel ami et confident, puisé-je l’obtenir ! 



Fin de la première tablette


Tablette II



La courtisane

Allons ! Lève-toi de ce sol qui sert de lit aux bergers !

Elle partage ses vêtements. Elle lui passe un de ses vêtements. Elle le prend par la main, elle le conduit comme un enfant, ou plutôt comme le dieu même un homme pour le présenter à un autre dieu.

Les gaillards dans leur hutte

Comme il ressemble à Gilgamesh ce gaillard ! par sa stature d’aussi haute taille, altier comme un sommet de rempart ! C’est sans doute Enkidu, le presque homme né dans le désert ? C’est lui dont les muscles sont aussi puissants qu’un bloc tombé du Ciel ?

La Courtisane

C’est Enkidu né de la steppe !

Stupéfaction.
Enkidu pleure, il a peur de manger du pain et de boire de la bière

Les gaillards

Depuis qu’il est né ce gaillard, il mange l’herbe printannière, c’est le lait des bêtes sauvages qu’il a coutume de téter !

Enkidu cligne des yeux et examine le pain

La Courtisane

Mange du pain, Enkidu, c’est ce qu’il faut pour vivre ! bois de la bière, c’est l’usage du pays !

Les gaillards

Pas si vite jusqu’à plus faim ! Pas si vite, sept chopes !

Enkidu

Mon âme est à l’aise et ravie, mes gaillards ! mon cœur bondit ! que je vous embrasse !

Les gaillards, la courtisane

Ton cœur bondit d’un tel enchantement que tout ton visage s’éclaire !

Enkidu

Oh oui ! Mon cœur bondit ! que je vous embrasse !

La Courtisane

Allons cuver, Enkidu, je vais te nettoyer avec de l’eau tout ton corps velu et y appliquer de l’onguent. Alors tu ressembleras à un homme !

Elle le nettoie et lui met un vêtement

On croirait un marié tout neuf !

Il empoigne une matraque pour faire la guerre aux lions

Les gaillards le regardant

Qu’ils sont tranquilles les pâtres ! et lui, il met en pièces les loups et il maîtrise les lions. Pendant que se reposent les chefs des bergers, lui Enkidu, il est le gardien, il est un homme vigilant.

Les pâtres

Doutons nous qu’Enkidu reste ici auprès de nous ? Que nous sommes tranquilles sous sa protection, il est le gardien, il est un homme vigilant et nous nous restons couchés les nuits entières.

La courtisane courroussée

Au lieu de rester sur place, il est temps que tu viennes à Uruk la ville aux enclos, la ville des carrefours.

Enkidu apprend les mœurs extravagantes de la ville

Oui, Lajoyeuse, je viendrai, je suis transporté de ma joie nouvelle, je découvre tout, j’ai tant de choses à apprendre avant que d’arriver à la Ville !

Arive un voyageur Enkidu, joyeux, le voit et le hèle
Ma joyeuse ! pourquoi est-il ici ? Je lui veux demander son nom !

La Courtisane au voyageur

Viens ici homme, soit le bienvenu !

Enkidu

Où vas-tu si vite gaillard ? Pourquoi ce voyage épuisant ?

Le voyageur

On m’a invité à une noce. Je me suis chargé de victuailles, de nourritures succulentes destinées à la noce. C’est la coutume des gens d’ici de présenter la future femme à son époux dans la maison de ses parents. Elle est isolée du monde et de tous les autres hommes par un grand filet dans la maison de ses parents. Là son époux doit la rejoindre loin du monde et des autres hommes dans la maison de ses parents. Mais pour le roi d’Uruk aux carrefours est ouvert le grand filet qui éloigne les autres hommes, il rejoint la jeune femme à la place de l’époux, avant lui. Pour Gilgamesh on ouvre le grand rideau avant l’époux légitime. La femme de l’autre, il la prend pour lui, tout le premier, il l’aime à la place de l’époux. Et le mari ensuite peut aimer sa femme. Tel est l’ordre porté par la décision divine et depuis sa naissance, ce privilège lui est reconnu, à, lui Gilgamesh ! 

Enkidu pâlit et furieux, la joie ayant quitté son visage

Je suis en colère contre cet homme Gilgamesh ! comment comprendrais-je jamais les mœurs odieuses de cette ville où l’amour n’est pas respecté ! Enkidu, tout naturel que je suis, je suis né dans le désert et je ne connais pas les coutumes subtiles de la ville. Je ne les aimes pas.


Enkidu marche le premier la courtisane derrire lui, les habitant d’Uruk se massent autour de lui. Il s’arrête dans une rue

Les badauds pâlabrant

De profil, c’est Gilgamesh ! Il est plus petit de taille mais il aussi fortement charpenté !

D’autres badauds

Oui, on voit que c’est un bel homme ! Ce gars là a bien brouté en son lieu de naissance l’herbe du printemps, il a bien tété le lait des bêtes sauvages !

D’autres badauds

Ajoutons une libation nouvelle afin de conjurer l’arrogance du nouvel arrivant ! qu’elle soit toute à son honneur cette libation !

D’autres

Baisons lui les pieds !
A Gilgamesh, bien qu’il est pareil à un dieu, il a été donné un double !

Enkidu se mesure à Gilgamesh

Préparatifs nocturnes d’une noce. Gilgamesh va rencontrer la future épouse, autour de sa taille une écharpe nuptile, cortège de Gilgamesh. Debout dans la grand-rue, Enkidu et se tient devant Gilgamesh et lui barre la route. Il bloque de ses pieds et de toutes ses forces la porte de la maison nuptiale, n’y laissant pas Gilgamesh entrer. Enkidu s’élançe contre Gilgamesh et, sur la grand place, il se trouvent l’un devant l’autre. Ils s’empoigent et comme des athlètes s’abattent contre le sol l’un mêlé à l’autre. La lutte est si forte qu’ils démolisent les jambages des maisons et les murs vacillent. Lorsque Gilgamesh ploye, met les pieds contre le sol, immobilisé, sa colère tombe et il détourne sa poitrine en signe de résignation.

Enkidu

C’est un être exceptionnel que ta mère a mis au monde, La Bufflesse des enclos ! Ninsuna ! Ta tête domine celle de tous les autres époux ! Enlil t’as assigné la royauté sur les peuples ! Mais pourquoi avoir voulu agir ainsi ? Ce n’est pas des femmes des autres que tu as besoin, ce n’est pas avec tes concitoyens que tu dois te mesurer, c’est un héros comme toi-même qui doit affronter ta force. Tu le regarderas et tu verras en face combien dans la force de l’âge, il est bien fait ! Combien il a de la prestance ! Combien il respire la séduction par tous les morceaux de sa peau ! Combien il t’égale en vigueur ! Il est infatigable, jour et nuit ! Mets de côté ta hargne, Gilgamesh : Cet Enkidu, né du désert, Enlil le chef des dieux lui a dilaté l’intelligence et Ea, l’ami d’Enlil, aussi fidèle qu’une épouse et le plus malin des dieux, lui a dilaté l’intelligence. C’est ainsi qu’il s’est plaint aigrement de ta conduite sans crainte de t’affronter. Regarde le bien en face et tu l’aimeras comme toi-même.

Gilgamesh ému

Oui, c’est un compagnon aussi fidèle qu’une épouse qui m’est venu, les rêves m’en furent présages, c’est un compagnon puissant qui a fait choir mes pieds contre le sol, c’est pourquoi ma colère est tombée et j’ai tourné ma poitrine en signe de résignation. Je pressens cet ami en toi Enkidu, mon égal enfin venu, héros à la vigueur totale ! La foule s’amasse autour de toi, mais moi je t’accueille car tu respires la séduction par tous les morceaux de ta peau et je te cajolerai. Ensemble nous ferons de grands actes.

Ils s’embrassent et font amitié. Gilgamesh prit Enkidu par la main et le conduisit comme un enfant devant sa mère.

Gilgamesh

Mère, c’est le plus fort du pays, le plus valeureux, ses muscles sont aussi larges qu’un bloc tombé du Ciel, il est altier comme le sommet d’un rempart, je l’aime. Il n’a pas son pareil, prend le bien en faveur, c’est un délice. 

Ninsuna, compatissante

Enkidu s’est plaint aigrement de ta conduite ! Aupartant c’était un rival, il a fait choir tes pieds contre le sol, et toi tu as détourné ta poitrine en signe de résignation. Mais toi tu l’as aimé.

Gilgamesh

Oui, mère, debout à la porte de la maison nuptiale, il s’est plaint aigrement de ma conduite. Mais cet Enkidu n’a eu ni Père ni mère ; sa chevelure flottait librement sur ses épaules : mis au monde en la steppe, nul ne l’a élevé !

La mère de Gilgamesh adopte Enkidu
Enkidu pleure
Gilgamesh prend sa main

Enkidu

Ami …

Gilgamesh

C’est une amitié éternelle qui est née entre nous, il n’a pas son pareil, prend le en faveur, c’est un délice.

Ninsuna

Je vois bien qu’un lien puissant est né entre vous et que c’est un compagnon secourable qui ne t’abandonnera jamais comme une épouse à tes côtés. Et moi je le traiterais comme ton égal et je le prendrais en faveur.

Enkidu est dépressif et lassif dans la ville

Gilgamesh inclinant son visage sur Enkidu

Enkidu dans la ville tu as maintenant une mère, n’est-ce pas une source de joie ?

Enkidu se lamentant

Mais dans la steppe je n’avais ni père ni mère, nul ne m’avait élevé. Enkidu vivait nu et sa chevelure flottait librement sur ses épaules et maintenant il est comme les gaillards d’Uruk avec une écharpe ceinturant sa taille !

Gilgamesh attentionné

Mon ami, pourquoi donc tes yeux sont-ils gonflés de larmes, ton cœur envahi de chagrin et toi profondément abattu ?

Enkidu

Mon ami, mes lamentations ont raidi les tendons de mon cou, mes bras ont perdu toute force, ma vigueur est anéantie, je ne fais plus rien. Dans la steppe je maîtrisais les lions, dans la ville mes forces peuvent à peine répondre aux cris d’amour des filles d’Uruk. Pour moi rien ne serait plus terrible que si la mort venait me prendre dans la ville quand je dors dans mon lit.

Gilgamesh

J’ai entendu tes paroles et j’en suis profondément bouleversé !

Alors Gilgamesh regarde par dessus les remparts

J’entends là-bas dans la Ville les lamentations de Deuil, Enkidu, écoute…

Inanna la déesse elle-même

Je suis d’Uruk, je suis la jeune femme d’Uruk, doutez vous que je ne sois la fiancée d’un gaillard d’Uruk ? Moi, la jeune femme, puisque je ne porte pas de voile. C’est inondé dans les rues de Kullab. Moi, la jeune femme, je suis d’Uruk. Dans l’assemblée des seigneurs, mon époux, dans l’assemblée des seigneurs, Dumuzi est retenu avec Gilgamesh, le seigneur des Enfers, avec Ningizzida, des bords du Girsu, Dumuzi désormais est avec ses pairs là bas aux enfers. Moi je suis la jeune femme qui ne peut dormir à cause de Dumuzi, étendu comme un taureau sauvage !

Gilgamesh

Ce peut-il que l’on m’appelle seigneur des Enfers ?

Un malade

Gilgamesh, du mal m’est survenu, je suis agenouillé devant toi ! extirpe la maladie qui est en mon corps, pourchasse la puissance du Malin Total, écarte le mal qui est en mon corps, viens aujourd’hui près de moi et écoute mon dire, je t’ai magnifié, j’ai répandu de la farine pure, j’ai fait pour toi une libation d’eau, un sacrifice pur !

Gilgamesh à Enkidu

Mon ami, il ne faut pas rester sans vigueur. En la forêt là bas demeure Humbaba le féroce, nous allons l’abattre et le rayer de la terre cet être funeste, ce Malin Total, nous couperons les cèdres et nous en fairons des portes sacrées. Nous jugulerons la nature dangereuse pour la gloire d’Uruk la ville. Nous irons car si des enfants ont été mis au monde, ce n’est pas pour rester inactifs !

Enkidu inquiet et avisé

Ami, que nous allions trouver Humbaba c’est impossible ! Je l’ai appris au désert, quand j’y vagabondais avec ma harde. Le tour de la Forêt fait six cent kilomètres. Qui pourra y pénétrer ? Humbaba, quand il crie, c’est épouvantable, sa bouche c’est du feu, son haleine, c’est la mort ! Il entend tous les bruit de la forêt qui donc pourra y pénétre jusqu’au fond ? C’est pour terrifier les gens, pour sauvegarger les cedres qu’Enlil la mis en place. Qui entrerait dans la foret serait paralysé ? pourquoi te mettre en tête une telle entreprise ? C’est un combat inaffrontable que l’accès au repaire d’Huwawa.

Gilgamesh

Je me suis mis à penser au mont de l’immortel, là bas dans cette forêt, au mont d’Humbaba. Enkidu, je suish encore en pleine vigueur mais je n’ai pas atteint la renommée, je voudrais entrer dans la montagne, m’y faire un renom, au lieu où l’on a fait un monument, je voudrais me faire un monument, au lieu où l’onn n’en a pas fait, je voudrais faire un monument aux dieux.

Enkidu

Ami, si tu veux entrer dans la montagne, fait le savoir au dieu Utu, le dieu soleil, ce héros. Quant à la montagne où l’on coupe les cèdres, c’est le domaine du dieu Utu, fait le savoir à Utu.

Gilgamesh tient d’une main unchevreau blanc, de l’autre presse contre sa poitrine un chevreau brun, il tient en sa main le sceptre sacré, et salut le dieu.

Gilgamesh à Utu

O Dieu Utu, je voudrais entrer dans la forêt, sois mon soutien, je voudrais entrer dans le pays où l’on coupe des cèdres, je t’en prie, sois mon soutien

Utu de sa place au ciel

Toi, aussi important sois-tu, jeune sumérien, que deviendras-tu en ce pays ?

Gilgamesh en larmes

Ô dieu Utu, je veux te dire un mot, tends l’oreille à ma parole, je veux te dire mo coeir et toi tu as déjà réagi. Dans ma ville, meurent des gent, c’est une coup pour el cœur, des gens péressient, c’est une souffranc epour le cœur. Je me suis penché par-desus le rempart, j’ai vu des cadavres qui flottaient sur les eaux du fleuve. Pour moi, il en sera de même, il en sera ainsi. L’homme le plus grand ne peut atteindre le ciel, l’homme le plus larfe ne peut étreindre la terre. Je suis encore en pleine vigueur, mais n’ayant pas atteint la renommée, je vourdrais entrer dans la montagne, m’y faire un renom, au lieu où il y a un monument, je voudrais me faire un monument, au lieu où il n’y en a pas, je voiuderais daire un monument aux dieux

Utu

J’accepte tes larmes comme une offrande en homme compatissant, j’ai compassion de toi.

Gilgamesh à Enkidu

Mon ami nous ne devons pas rester inertes, si des enfants ont été mis aux mondes ce n’est pas pour rester inactif !

Fin de la deuxième tablette

Tablette III


Comment nous autres pourrions nous gagner la foret de cedres ? elle est sous la sureveillance du dieu Wer, le dieu orage,, puissant qui ne dort jamais. C’est wer qui a commis himbaba, c’est adad qui l’a commis. Et lui-même Humbaba l surveille, pour sauvegarder la forêt des cèdres c’est Enlil qui lui a assigné les sept terreurs

Adaptation 1 : Le roi qui aimait trop les fleurs



Conte de Françoise Mallet-Joris mis en drame musical par Cédric Costantino et agrémenté d’une fin tragique.


On m'a dit qu'il n'y avait pas d'illégalité de faire une adaptation sans le droit de l'auteur du moment qu'on ne cherche pas à faire de profit financier. Si je me trompe toutes mes excuses. Mais que l'on sache que j'ai écrit depuis deux ans à Françoise Mallet-Joris et à tous ses éditeurs et que je n'ai pas eu de réponse d'elle, elle n'est pas fautive de son silence m'a-t-on dit aussi. Mon opinion personnelle est qu'elle n'a pas supporté ma médiocrité en orthographe ! En tout cas cette aventure a inspiré le prologue qu'il faut prendre pour un hommage plus qu'un irrespect. A cause de la localisation du-dit prologue, mon travail est dédié à Claude Lignel qui ne le mérite pas du tout.


Liste non encore exhaustive des personnages :
L'oursonne : une récitante
La fourmi : un récitant
Le narrateur : soprano et récitante
Charmant le roi : sopraniste
Un ministre puis jeune bœuf : alto
Un paysan : ténor à caractère, le même fera le maître d’école.
Chœur d’hommes pour les ministres, les soldats, les bœufs d’école et de cour (ténors et altos hommes mais aussi les enfants), les bœufs révolutionnaires (ténors et altos hommes)
Divers voix solistes de ténors et barytons pris du chœur pour quelques rois et quelques soldats
Chœur de femmes pour les mamans et, avec les enfants, pour les chats de cour e tla chorale des chats.
Chœurs d’enfants et enfants solistes pour le peuple
Le bœuf héroïque mais avant aussi le policier : un baryton-basse
Le roi Bagarre : une basse profonde
Mignonne sœur du roi : une soprano colorature
La vache sucrée mère du bœuf révolutionnaire : alto femme
Gracieuse première épouse de charmant : mezzo-soprano
Précieuse seconde épouse de charmant : soprano voix blanche (adolescente de 15 ans, elle ne fera que murmurer)

Suggestion d’instrumentarium faite à Silvia Colasanti.  

Harpes, luths et théorbes et mandragores, quintette de violes (avec le violone et lyrone joué alternativement par un violiste) deux violons solistes et un violoncelle, des hautbois modernes (ou anciens), un cor (les clarinettes et les trompettes seront pour après à moins que l’on mette de la trompette dans le réveil du roi), un basson, un cervelat (qui va avec les violes, son son grave vibre comme un zèbre) et naturellement un orgue positif traité à égalité avec les autres instruments ajoutera sa douceur tout le temps mais aussi sa régale pour le roi Bagarre. (On trouve les instruments spéciaux dans l’anthologie des instruments renaissance chez Ricercare, lyrone s’entend beaucoup dans les disques baroques moderne, c’est une constellation d ‘étoile). S’il est possible aussi d’y mettre une trompette marine soliste, elle sera jouée par un des violistes ?

Naturellement c'est un pré-travail pour un livret ô combien plus court !



PROLOGUE

L'oursonne – Voici un beau trône pour voir le panorama
La fourmi – Bonjour, ours, veuille excuser l'audace d'attirer ton attention
L'oursonne – qui parle ?
La fourmi – C'est moi la fourmi, Claude ! Tu dois être grand roi pour t'asseoir sur le trône des Tricastins !
L'oursonne – Je ne suis pas un roi, je suis une reine, Françoise Jaret-Molis
La fourmi – Tu es si costaude que j'ai cru voir un mâle...
L'oursonne – La femme peux plus encore, Arsinoé, Hatshetsout, Cléopâtre, Elysabeth et Victoria changèrent la face du monde par leur flair.
La fourmi – Puis-je oser m'asseoir à tes côtés pour voir le panorama en ta compagnie ?
L'oursonne – Nous permettons.
La fourmi – Moi aussi je suis prince en mon pays, tu vois à tes pieds ces petits trous, c'est lolboule, en linguistique clodiopolis se transforme en loiopoule puis, à cause d'internet en lol-boule. Nous, fourmis sommes très modernes.
L'oursonne – franchement je ne vois rien !
La fourmi – Ta vue est très grande et ne peut s'arrêter à si peu de choses...
L'oursonne – Tu l'as dis, je ne vois que les grandes choses : par exemple ce beau panorama avec au fond ces héoliennes !
La fourmi en parlant des cheminée nucléaires – Comme les êtres humains sont forts ! ils ont fabriqué de grandes bouches pour produire des nuages pour le ciel, ils fabriquent de la beauté !
L'oursonne – En vérité c'est une usine d'abeilles géantes qui fabriquent du miel géant et la fumée sort des fourneaux qui crachent de la vapeur d'eau, ce n'est pas des nuages
La fourmi – Tu as une connaissance très vénérable et cette usine ressemble à ma ville qui travaille sans cesse, nous autres fourmie somme des ouvrières !
L'oursonne – Ca me gratte !
La fourmi – A l'aide ! Si le metteur en scène est pessimiste la fourmie est écrasée, s'il est clément elle s'enfuie.
L'oursonne – Certes ma connaissance est sans limite ! (silence) Mais où est-elle passée ? Ah les jeunes n'ont pas de constance, ce n'est pas sérieux. Bon j'ai à manger, assez rêvé, j'y vais.
Les fourmis – Hélas, chacun doit prêter garde à ses actes, ils peuvent entraîner de grands malheurs, voilà ce qu'enseinge l'histoire que vous aller entendre.







SCENE 1 « DU SOMMEIL »


Récitant qui est impérativement une femme (pour moi j’entends Agnès Mellon)

En ce temps où chaque bête parlait en beau langage – et même les êtres humains – il était un roi qui adorait les fleurs. Nulle sonnerie ( car, à l’époque, le réveil-matin n’était point encore inventé de sorte que les enfants n’allaient jamais à l’école), nulle sonnerie pour lui ouvrir les yeux mais à son chevet roses, jacinthes, lys, lilas…

Le roi (sopraniste) tout endormi (récitativement)

Qui ne sait que les rêves n’ont pas d’odeur ?
Doucement monte et pénètre mon rêve
L’odoré contenu du vase, du pot, de la gerbe…
Ouvrez vous, yeux empesantis !
Hâtez vous de me ramener sur la terre
Où m’appellent ses beautés olfactives

Récitant


A peine remuait-il la paupière que ses ministres attroupés (il était en effet coutume d’assister au lever du roi et l’on se disputait l’honneur des tabourets), étonnés ou envieux, tous de s’écrier :

Chœur


Quelle merveille d’un odorat si fin !
Vivas vivas au roi Charmant !

Le roi - aria

Fussè-je au paradis lui-même
Que ces lys eussent tout attrait nécessaire
A me restituer au séjour terrestre

Choeur

Quelle merveille d’un odorat si fin
Vivas vivas au roi Charmant !

Récitant

Voici venu l’automne, l’hiver approche qui sera rude : inutile de vous dire qu’il y dort sempiternellement, tant les fleurs d’hivers sont rares, leur parfum léger. Voilà donc ! le roi ferme les yeux (temps de musique du roi qui ferme les yeux) Ecoutez le sommeil du roi qui s’appelle Charmant, charmant aux rêves fleuris…

(ici un petit ballet de fleurs autour du lit du roi) pendant que le chœur chante durant le sommeil)

Chœur, air du sommeil

Au temps des perce-neiges, il vous mettrait des une heure,
Une heure et demie à ouvrir les yeux
Mais au temps des jasmins ou du réséda :
C’est l’affaire de cinq minutes !

Un paysan (ténor à caractère) en récitatif (conseille de bien écouter en français les films de Gabin et autres des années 50-60 car c’est des voix ainsi que l’on a dans l’oreille)

Pff, tout ce beau monde, ces ministres,
Ces Mademoiselles
Ça l’appelasse Charmant,
Moi j’app’lions le Roué (roi) Marmotte !
C’est –y pas plus « réalistique » ?
Not’ terreau, les flatteurs d’historiens
Ça l’appelasse « terre Charmante »
Nous, nous l’app’lions « pays Marmottin »

(ritournelle)

V’là qu’l’an passé
L’hiver qu’il était trop long !
A cause des loups qu’ils font du vent en hurlant…
Et le printemps pas folichon :
Le gel, je te dis ! qu’il te flanque à terre
Les p’tites pousses, les bourgeons,
Même le « crocus minus » (prononcé avec ironie) au fond du boué (bois) !
Tu sais quouéé (quoi) ? le Roué,
Ben il a « somnolé ! »   oui ! d’puis novembre, j’t’dis !
Pis, début mars, vlà qu’il a marmonné :

Charmant (accompagné des harpes et des théorbes)

Que l’on m’apporte les narcisses nouveaux…

Le Paysan

Et son miielleux de gros ministre, vlà qu’il li dit :

Le ministre (un alto) aria précieuse et napolitaine

Sire, hélas, c’est un malheur !
Que sa Majesté ne me tienne en disgrâce
Si la nécessité de la nature me mette en l’impossibilité
D’assouvir Son souhait : les narcisses tardent par infortune.

Le paysan

Ben il s’est rendormi l’autre !
Tout de bon et ben d’un coup !
Que tous ces demoiseaux il lui ont mis une grosse touffe de chevrefeuille dans la narine
A la mi Avril,
Que ça a mis du temps pour qu’il soit tout vif.

(Ritournelle)

Le Chœur

Puisqu’il dort en ce moment…

Charmant dans son sommeil

Ces beaux lys, ah cette rose rouge sang…

Le Chœur

Le roi Marmotte qu’on dit Charmant
On peut vous dire ce qu’on en pense…

Charmant dans son sommeil

Ce tapis de bégonia, ah la rose de sang !
Parfum capiteux… envoûtement
Que l’on épargne les boutons d’or
Que l’on interdise de marcher dehors

Le Choeur

Qu’il est agaçant ! mais il a ses bons côtés
Il est pacifique
On est tranquille tout l’hiver.
On est tranquille tout l’hiver

Charmant (pendant le chœur)

Que l’on épargne les boutons d’or
Que l’on interdise de marcher dehors
Epargnez nos petites soeurs les fleurs


SCENE 2 « DE LA CUEILLETTE DES CHAMPIGNONS »


(il pleut, la foule a des capuchons rouges et de la fourrure, il y a des champignons partout, évidemment un figurant est déguisé en schtroumpf (puffi) et tout le monde danse sous la pluie)

Récitant sur la musique

Et c’était dans les bois dénudés qu’on faisait des pique-niques, emmitouflés de fourrures : hélas ! l’été, c’était interdit à cause des boutons d’or qu’on eût pu écraser.

Aria du paysan

Moi j’m’en plains point !
Tant mieux qu’cet hiver il fra ben froué
Plus de roi, plus d’impôts, plus de gabelle
Plus d’acquittements, plus de dettes sur mon dos …
(ritournelle reprise plus loin : ) Finie la quillotte, vive la joué (joie) !

Chœur d’enfants (presque du rap)

Haha On dansera en patins à glace
Le roller c’est pas super (prononcer supeur) :
Ça le fait pas pour les fleurs !
Les roulettes, c’est pas chouette ;
Mais le patin à glace, c’est classe ! 

Chœur des Mamans

Allez petits trognons !
A la cueillette aux champignons !
Mettez vos imperméables
La journée sera agréable
Maintenant que les nuages se font denses
La pluie est propice aux vacances

Un enfant en parlant :

Ah oui marre de tous ces écriteaux partout
Qui nous supplient dès le redoux :

Une basse-baryton, un policier, en parlant (avec le même thème des fleurs par les instruments que celui qui fut chanté par le roi)

Epargnez nos sœurs les fleurs !

Trois enfants en polyphonie

Ché noia ! L’été c’est pas du plaisir ! Piire ! (une chute glissando sur le dernier mot)

Tous les enfants

(ritournelle :) Vive la joué !

La basse en colère contre les enfants - Arietta furiosa (arietta parce que plus lloi il y aura la grande aria furiosa du roi Bagarre qui sera une basse profonde)

Que la sollicitude du roi s’étende en Terre Charmante
jusqu’aux champignons
De par leur senteur agreste.
Prenez gardes aux automnes à fleurs sylvestres
Que l’on hâte le réchauffement de la planète !

Tous (avec la citation musicale (vive le vent) des paroles issue de la musique de Noël)

Ah non, vive le froid
Vive le vent d’hiver
Vive la chute des feuilles

(ritournelle :)

Finie la quillotte, vive la joué !

(polyphonie :)

C’est le temps de jouer, c’est le temps de s’emmitoufler

(fugue :)

Nous surveillons qu’il ferme l’œil
Eh hop ! dès que la grande nouvelle s’étendra :
On cuisine des omelettes aux champignons
On se lèche les doigts jusqu’au moignon !

(Ritournelle : ) Hihihi !
à transgresser l’interdit
C’est la joie des petits plaisantins
(Forte :)
Que les hivers sont gais au pays Marmottin !

(maintenant il neige)

Aria du narrateur

Et les petits garçons
Si mignons,
sous leurs capuchons
s’en allaient au bois
tant que le roi ne sait pas,
pour remplir leurs paniers
des mets de la forêt,
chantant une vilaine chanson
dont je tairais les couplets,
oh ! trop grossiers !

Chœur d’enfant - chanson

Vive la gibelotte
Avec des champignons !
Pendant que nous mangeons
Ronfle, seigneur « Marmo-o-tte ! »

Tous

Vive la gibelotte
Avec des champignons !
Pendant que nous mangeons
Ronfle, seigneur « Marmo-o-tte ! »

(Ritournelle du coeur : ) Hihihi !
à transgresser l’interdit
C’est la joie des petits plaisantins
(Forte :)
Que les hivers sont gais au pays Marmottin !

(avec le paysan : ) Finie la quillote, vive la joué !



SCENE 3 « BAGARRE S’EN VA T’EN GUERRE »


(Nous sommes dans le château fort très fort du roi Bagarre)

Bagarre – brr ! j’ai froid ! je n’arrive pas à me réchauffer !

Un soldat – fais la guerre !

Bagarre – j’y pensais justement, cela me titille !

Une moitié des soldats – C’est bon la guerre !

L’autre moitié – On est secoué tout d’abord par son cheval !

Moitié 1 – Ce qui met le sang en mouvement !

Moitié 2 – Puis on dresse sa tente !

Moitié 1 – Ce qui est encore un fameux exercice !

Bagarre – Et au moment où, se couchant, l’on va recommencer à avoir froid…

Tous – Tout s’effondre !

Bagarre – Hummm ! Et il faut tout recommencer du début ! youpi !

Tous – Alors on a tellement chaud qu’on n’a plus sommeil,
On démonte la tente, on s’en va ailleurs.

Bagarre – Mais mes gaillards ! ce qu’il y a de moins amusant dans la guerre…
C’est qu’il faut bien tuer quelques gens !

Tous (dépités) – Oh  ce n’est pas beaux !

Bagarre - Autrement on ne serait plus pris au sérieux !

Tous – Il faut bien, il faut bien !
Bagarre il n’aime pas cela !
Qu’on vous le dise : au fond c’est un brave homme !

Bagarre (crescendo pour l’orchestre) –

Et puis cela ne me réchauffe guère de couper la tête aux gens,
Mon sabre et exactement effilé à point,
Si bien que cela en devient trop facile
Et c’est d’un ennui dépitant.
Non ! ce qui vaudrait vraiment la peine : vous voulez savoir ?

Les soldats – Oui ! oui !

Bagarre - C’est de faire la guerre avec un roi qui se défendrait !
Alors, là, oui ! il y aurait du plaisir !

Les soldats – Hourra !

Aria furiosa de Bagarre

Ramper dans les bois de jour et de nuit
durant des lieues et des lieues
Sous ce prétexte facétieux
Qu’il faille se dissimuler de l’ennemi,
Assiéger longuement la bourgade,
Et construire - ô but que j’idolâtre -
une belle et forte palissade !
Imaginez ! à abattre, les pins !
Les troncs à débiter en rondins,
Les rondins à tailler en pieux !
Les pieux dont les pointes sont à durcir au feu !

Les soldats

Marches, sièges, arbres, troncs, rondins, pieux pointes et feu ! Ah !

Bagarre

Déliciosité du siège ! Dégustation même !
Grimper sur de hautes échelles
En armure de bien trente kilos et belle !
Que pensez-vous ? amusement suprême !
Il faut que les échelles s’effondrent de tant en tant…

Les soldats

Malheur !

Bagarre

Et avec un peu de chance - il s’entend -
Une pièce de l’armure se tordra !
On la redressera, n’est-ce pas ?
Soi-même ! à coups de marteau !
C’est succulent ! c’est rigolo !
Et quand l’échelle tient bon,
Alors ce sont les pavés que l’on reçoit sur le cabochon,
L’huile bouillante, C’est onctueux !
Les blessés à soigner, c’est délicieux !
C’est délicat !
La fête, quoi !

Les soldats

La fête quoi !

Bagarre

La vraie vie !
Comme on dit : La chaleur des combats !
`
Les soldats

Ah vivement la chaleur des combats !

La narratrice (lamento) on peut l’habiller en épouse du Roi si l’on veut

Pauvre Bagarre, comme tu rêves, tu le sais bien !
Las ! Ce plaisir t’est interdit jusqu’ici !
Tes voisins tout juste ont-ils compris leur malheur …
Tout juste se sont-ils aperçus de la guerre en leur terre…
Qu’as-tu fait de bien en fait d’armes jusqu’ici ?

Bagarre

Bououh ! comme Madame la Narratrice à raison
Je suis malheureux !

Les soldats

Bououh ! Le Roi est malheureux !

Une partie des soldats puis tous en même temps

Tu conquis pourtant la terre de Finbec…
Tu conquis pourtant la terre de Finbec…

Bagarre & la narratrice

Finbec ce jour-là était trop occupé à discuter du menu avec son cuisinier :
Il n’opposa aucune résistance, ne me (te) vit même pas !

Finbec (en coulisse)

Miam, miam
Huummm !

Les soldats

Tu envahis la terre de ton neveu Bel-Amour…
Tu envahis la terre de ton neveu Bel-Amour…

La narratrice

Ce jour-là, il se regardait dans le blanc des yeux,
le blanc vide de sa fiancé la princesse Aubépine…
Et ce lui était un plaisir
Exhaustif…

Bel-Amour & Aubépine (en coulisse)

Ha !!
Smag, smag, smag…

Les soldats

Et Miremoi ?

Bagarre

Il astiquait son miroir ! ô desespoir !

Miremoi (en coulisse)

Je ris de me voir si beau dans ce miroir

Bagarre

La guerre ?
A peine s’en sont-ils aperçu ! rois et princes hystériques
A passions, à tics,
Maniaco-dépressifs !
Quant à résister, bernique !
Oh les vermisseaux passifs !

Air furieux

C’est pour n’avoir pas l’air ridicule
Et par quasi contrainte de honte !
Que je les ai tous bousculés dans mon donjon,
Vous comprenez, au moins j’avais des prisonniers…

La narratrice

Ah mais n’oublie pas ! Bel-Amour et Aupébine les yeux soudés :

Bel-Amour & Aubépine du fond de la geôle

Merci tonton chéri !

Bagarre Excédé

Si j’étais méchant je leur crèverais les yeux d’amoureux !

Bel-amour & Aubépine

Merci tonton chéri de nous avoir bien plus étroitement réunis !


Bagarre fait le geste d’étranglement

La narratrice 

Et n’oublie pas le roi Généreux que l’on appelle Miremoi !

Miremoi

Cher cousin, j’ai meilleure mine ; ainsi déchargé des soins de l’Etat, n’est-ce pas ?

Bagarre

Trop aimable mon cousin !

Les soldats

Et cette odeur de cuisine exotique : c’est Finbec qui nous régale,
C’est son nouveau hobby…
Vive la bonne cuisine ! à la Soupe, à la Soupe !

Bagarre

Ah c’est trop dur !
Ah combien je rêve d’aventure !
Fichtre d’évasion, de poursuite revigorante,
Exaltante, réchauffante !
Je suis accablé de tristesse, accablé de tristesse !
Où est ce roi qui se défendrait ?

La narratrice insidieuse

Attaque la terre Charmante là-bas il y a des barbelés…

Bagarre

Des barbelés !
Enfin de l’espoir ! des barbelés !
C’est une défense inouïe, inédite,
Une défense féroce annoncée !
Attaquons la terre de Charmant III
Qui a quelque trésor à protéger,
Ainsi aux pieds n’aurai-je plus froid.

Les soldats

Attaquons ce vrai ennemi …

Bagarre

Et réchauffons-nous !

Les soldats

Assaillons les barbelés aux vrais picotis !

Bagarre

Pourvu que les picotis me réchauffe les pieds.

Chœur des soldats, grande fugue

Que les pieds du roi retrouvent tout leur feu
Et qu’en guerre nous soyons tout heureux !

La narratrice (en parlé sur la musique)

Quel comique! Mais laissons le roi Bagarre qui s’en va t’en guerre dans ce seul but inavoué de se réchauffer les pieds, car il faut vous le dire, il était assez gentillet au berceau, bien qu’il remuait frénétiquement ses pieds froids, aussi fut-il baptisé Bon, et même à l’âge des épées de bois, sa Maman l’appelait « Bon-Bon » mais il se fit nommer « Bagarre » tant il en avait marre et il fit de la guerre pour ses pieds l’édredon. Mais laissons le là préparer l’historique combat de la « Plaine-aux-Bœufs » et racontons en pays Marmottin, les mésaventures de quelqu’un qui va changer le destin de chacun.


SCENE 4 « L’ECOLE DES BŒUFS »

Tout le début de la scène est parlé sans musique

La vache sucrée (devant la porte de l’école)

Mon petit Monseigneur,
Vous m’obéirez séant
Et prendrez le chemin de l’école.

Le jeune Veau

Non Madame, Grande Vache Sucrée,
J’ai toujours été élevé au château
Et ne veux point me mêler aux autres veaux
Manants.

La vache sucrée

Comment ?
Ne parle pas à ta mère sur ce ton !
Je sais pour toi ce qui est bon :
Ne t’ai-je pas jusqu’ici tout donné :
Écuelle d’or, coussin d’argent,
Leçons de danse et de chant
Maître de musique et d’arithmétique…
Je n’ai rien épargné pour toi :
Et je veux pour toi les meilleurs à cette école d’élite,
Les meilleurs professeurs de cours floraux !

Le jeune Veau

N’y a t-il pas dans le palais
Quelque précepteur en cours de genêts ?
C’est pour les genoux des princesses que je suis né
Et non pour les bancs gelés de l’école prolétaire !

La Vache sucrée

Effronterie !
Sache que si je suis la vache favorite du roi
C’est que de ma vie je n’ai jamais mangé que du riz au lait
Et jamais de fleurs je n’ai croqué.
Et c’est à l’école que j’appris cet art
Avec plusieurs professeurs excellents
Sans laisser de place au hasard.
Te présenter à l’examen par cours particulier ?
C’est trop risqué :
Je ne veux pas négliger le danger
En te laissant dans l’oisiveté et la prospérité !
Le monde est dur,
Il te faut un peu te frotter à la société :
Acquiers de la rudesse spartiate, de l’expérience
de la ruse pour ne pas finir chez le boucher.

Le veau en pleurnichant

Certes, Madame Grande Vache Sucrée, tu as raison !
Je vais donc y aller.

La Vache sucrée

Et tâche de rendre ta mère fière. (elle ouvre la porte de l’école et laisse entrer son fils)

La narratrice en parlé sur la musique

Êtes-vous étonnés d’entendre parler d’école alors que les enfants n’avaient pas de réveil matin ? Jadis, les bovins se rendirent compte qu’étant les ennemis naturels des fleurs, ils avaient à accomplir une pénible rééducation pour surmonter leurs instincts, on les aida d’ailleurs par les moyens subversifs que les politiques connaissent pour la colonisation. Ils trouvèrent ainsi les faveurs du roi et moult subventions. Des universités se montèrent et le royaume jugea l’effort si méritoire que les bœufs en vinrent à partager avec les chats l’honneur du titre d’Espèces Animales en Faveur de Cour (E.A.F.C.).

Notre veau qui était orgueilleux prit donc le chemin de l’école avec l’idée d’y réussir.

Toute cette partie de la scène est chantée

Le veau (entrant dans l’école)

Qui sait si le roi impressionné par mon succès
Ne me donnerait pas une part aux affaires de l’Etat
Veau Ministre ! En lieu et place du grand vizir, le chat Rhabbia :
Président de l’E.A.F.C. !

Le maître d’école autoritaire et militaire

Mes enfants, bonne rentrée,
Prenez vos cahiers et : attention !
Vous tous ! attendez vous à être mangés !
Car il est dur le chemin pour survivre,
Il faut être plus que doué, il faut être très doué !
Qui de vous sait ce qui va vous arriver,
Quel programme pour éviter le boucher ?

Une génisse

Vous allez nous apprendre à ne pas manger de fleurs
A l’aide de grandes planches en couleur,
On distinguera la moindre paquerette, le plus petit bouton d’or,
C’est chouette !

Le maître d’école

C’est exact, tu auras un bon point,
Prenez de la graine les autres !
Qui sait ce qu’est un bœuf de classe A ?

Le vœu de la vache sucrée

C’est ma mère !

Le maître d’école

Et toi tu risques fort de finir en quartier !
Sache que la classe se gagne sur le seul mérite personnel
Et non l’hérédité, mauvais point pour toi !
Un autre pour répondre (il désigne un vœu) ?

Un vœu

Un Bœuf de classe A reconnaît à l’odeur toute fleur, il est bien éduqué, porte de beaux vêtements, se manucure le sabot et le laque souvent avec de raffinés motifs champêtres.

Le maître d’école

Son signe distinctif ?

Le vœu

A l’issue de l’école, on lui coupe les cornes pour symboliser sa douceur.

Le maître d’école

Bien 18 sur 20.
Toi l’arrogant, définie un Bœuf de classe B.

Le vœu de la vache sucrée

Un bœuf de classe B n’a pas l’odorat sûr mais une vue perspicace,
C’est un bourgeois, il a obligation de porter des pantoufles de feutres.

Le maître d’école

Et pour quelle raison selon vous ?

Le veau

Car il est toujours susceptible d’écraser une fleur.

Le maître d’école sur un ton pathétique

Un malheur est si vite arrivé ! une poussière dans l’œil, une conjonctivite…
Et voilà une violette, parfois deux, écrasées sous le lourd sabot !
Sans compter les représailles qui s’en suivent…
Qui de vous a déjà vu en vie un veau de classe C ?
Personne ne répond ?
Qui sait pourquoi on n’en voit jamais ?

Un vœu en pleurant

Un bœuf de classe C est un bœuf mort !
On l’a amené chez le boucher parce qu’il a échoué à l’école.

Le maître d’école jouissant

Et oui, je suis au regret de vous dire qu’on les mange.
Il faut bien manger quelque chose ou quelqu’un
Gare à vous de ne pas échouer,
Chaque année je vois deux ou trois de mes « chers » élèves
finir sous la massue « justicière » du boucher.
Statistiquement, 1, 26 pour cent d’entre vous seront morts d’ici à la fin de l'année.

Entendu !

Donc nous allons suivre le programme que voici, notez sur vos cahiers :

Ce que chante le maître est repris en canon par le chœur mixte des veaux

Le lundi : cours d’apprentissage de lecture de planche avec expressions écrites (reproductions de fleurs, arts plastiques, modelage, morphologie) ;

Le mardi : travaux pratiques, sur un terrain artificiel (car avant l’examen pas question de mettre en danger les vraies fleurs) nous éprouverons votre vue ;

Le mercredi : cours de soutien en demi-groupe pour les élèves en difficulté : les cancres ! les autres seront au repos, je leur conseille vivement d’aller observer les choses de factu, in Nature ;

Le jeudi : cours d’histoire des fleurs le matin et gymnastique des sabots l’après-midi, vous apprendrez toutes les tactiques pour éviter les risques d’ « écrasement » ;

Le vendredi dans des box séparés : initiation à l’odorat, vous devez répéter, rabâcher jusqu’à l’écoeurement le repérage olfactif ;

Le samedi matin : examens blancs. Chaque semaine, vous serez donc notés et recentrés sur vos défauts. Vous devrez alors faire votre autocritique humiliante devant vos camarades qui vous jugeront dans un débat impitoyable d’expression orale.

Compris ?

Les veaux

Oui !

Le maître d’école

Silence !

Il parle seul dans le silence et dans une grande inquiétude dramatique :

A la fin de l’année vous aurez à subir avec de vraies fleurs, dans un vrai prés, une première épreuve d’odorat dans laquelle, les yeux bandés, vous aurez à brouter de grosses touffes d’herbes grasses au milieu desquelles on glissera, subrepticement et une fois sur deux, un coquelicot ou un bleuet, si vous avalait tout sans distinction ou si vous arrachait ne serait-ce qu’un pétale vous serez impitoyablement reléguant en classe…
Allez ! en classe ?

Tous les veaux

B !!

Le maître d’école

En revanche si vous réussissez l’épreuve, vous passerez en étude supérieure de classe … ?

Tous les veaux

A !!

Le maître d’école

Pour les autres, les misérables de classe B, ils subiront en deuxième année une sévère rééducation :
Et croyez moi, ils vont en bavez terriblement, ils sueront, ils vomiront !
Ils ne seront même pas encore sûrs de ne pas finir en classe C !
A l’issue de l’étude, ces beaufs et ces vaches-là, malgré leur vilaines et grossières cornes, s’ils sont assez intrigants – ce dont je doute vu leur lamentable échec en examen de première année - pourront à la limite être reçu dans la bonne bourgeoisie, Mais à la Cour, fi !

(avec un ton plus doucereux)

Mais pour les heureux, les merveilleux, les sur doués élus de la classe A,
Il accèderont aux études de classe supérieure et pourront préparer une thèse qui aboutira, sait-on jamais, à la notoriété. (le fils de la vache sucré soupire de plaisir en se figurant le statut que décrit le maître) Ils seront dès la fin de la première année, joyeusement dotés de leur beau diplôme, choyés et recherchés dans les meilleurs salons et par les plus belles demoiselles et les plus valeureux chevaliers, il feront leur entrée à la Cour où il seront un bon parti à marier, comme le royaume tient à une bonne reproduction suivant l’ethnie de la classe d’élite. Qui rêve d’un tel bonheur ?

Les veaux tous ensemble

Moi ! moi ! moi !

Le maître

Silence ! Génisses ! veaux !
Discipline, application, rigueur ou, sinon…
La mort !


SCENE 5 « L’EXCES D’ETUDE DU FILS DE LA VACHE SUCREE »

Dans cette scène le jeune veau est seul à sa table d’étude
Je vois cette scène comme un sprichtgesang à la manière de Schoenberg

La narratrice

Le fils de la Vache Sucrée était ambitieux. Ce jeune veau travailla dur pour décrocher une mention spéciale. Il fut le major de son année, le premier de Classe A, et si péremptoire que les autres le regardait désabusés. En étude supérieure, il s’isola pour travailler, Il rêvait :

Le veau

Ministre ! Un veau, cela ne s’est jamais vu, ou presque !

La narratrice

L’orgueil le poussant, tard dans la nuit, penché sur sa botte de foin,
Il humait,
Les yeux fermés, s’exerçant à reconnaître la plus subtile différence entre deux graminées.

Le veau

Ah Maman tu peux être fière de moi :
Les autres sont bien futiles,
Encore plus les fils de bonne famille :
Voyez les après l’écuelle de lait,
Chacun se dissipe en écoutant du Mozart tôt le matin
En dansant la bourrée, le menuet,
Moi, studieux, le nez dans la rosée,
Je m’acharne, je suis capable non seulement de discerner,
Parmi l’herbe humide,
Nos timides sœurs parfumées,
Mais bien plus je peux sélectionner et dénommer :
Je ne broute pas « de l’herbe » comme disent aveuglément les stupides B,
Je distingue, moi, les aromatiques, la menthe, le thym, la sauge de velours.

La narratrice

Il envisageait même une œuvre trés avancée, plus hardie que ces prédécesseurs, une thèse puissante. Le sujet en était choisi :

Le veau

« Le serpolet du poète »
Qui de vous ne connaît la fable de La Fontaine :
Le chat la belette et le petit lapin
Où le poète évoque un festin
De thym et de serpolet ?
Le thym, bon, tout le monde connaît ça !
Il y en a plein les jardins, pleins les prixunics !
Mais le serpolet ?
Qui de vous a jamais vu des serpolets ?
Un parterre de serpolet ?
Un magasin de serpolet ?
Personne et moi non plus !
J’ai pourtant fait beaucoup de recherche.
J’ai cherché dans les livres
D’hier et d’aujourd’hui,
Dans les gloissaires
Les dictionnaires
Les thésaurus même !
Les lexiques et les annuaires
En langues françaises et régionales
En moyen français et en vieux français
En latin, en grec, en sanskrit, en hébreu
J’ai égrené les bulletins et les thèses
Sur internet,
Dans les magazines et les magasins,
J’ai téléphoné aux paysans de tous pays
En toutes langues,
Rien n’a abouti.
Peu à peu je suis arrivé à la conclusion hardie
- et je compte bien la défendre en mon livre :
« Y a-t-il du serpolet ?
Où ? Nulle part ? Alors le serpolet n’existe pas ! »

Un silence

Ce livre fera du bruit où je me damne !
Il y aura des défenseurs du serpolet, des anti-serpolet
Le serpolet lui-même viendra bien se manifester
Et se sera une savante controverse que l’on enseignera pour l’éternité à l’école…
Ah quel beau livre je vais écrire !

Narratrice

Mais le livre ne fut jamais écrit.

Le veau

Atchoum !

Narratrice

Un gros rhume ! à force de chercher, de flairer l’herbe humide,
Le studieux veau pris un gros rhume, un terrible rhume. Ce fut ce qui bascula le destin de tout le royaume.


SCENE 6 « LE GRAND BAL AU PALAIS ».


Maître de ballet (un veau)

Pavane belle fleur interprêtée par les chats du palais
Entrée des fleurs merveilleuses
Entrée de la princesse sœur du roi
Entrée du roi Charmant
Entrée des duchesses et des ducs paires du Royaumes
Entrée des hauts ministres
Entrée du grand chat Rabbhia ministre favori
Entrée de la vache sucrée favorite du roi et de son fils intelligent
Entrée des veaux de haute classe
Bourée particulièrement réussie dansée par le veau et la princesse mignone

Princesse Mignonne

Que votre pas est délicat,
c'est une rosée de fleur !

Le veau enrhumé

Votre compliment n'a d'égale que votre meauté
bareille à la fraîcheur d'un bétale!

Princesse Mignonne

En récompense de cette bourée charmante
je vous offre une glace à la menthe

Le veau

Mes yeux en sont tout embués d'ébotion !

Il avale le bouquet qu'elle porte dans l'autre main

Le veau renifflant

Ce n'était pas bauvais, ba foi. Puis-je, puis-je en avoir une seconde ?

Un ministre

Mais ! qu'avez-vous donc fait misérable !

Elle s'évanouie

Tous

Sacrilège !
La foudre des malheurs tombe au beau mileu de nos salons !


Tous

La mesure est comble !
effronterie camikaze !

Le veau

Quoi ? qui a-t-il donc à banger une glace ?

Tous

C'est des fleurs, ô sacrilège,
des fleurs qui périssent!

Le roi charmant

ah !

La princesse Mignonne

ah !

Tous

C'est des fleurs, ô sacrilège
des fleurs qui périssent !

La vache sucrée s'évanouïe à son tour

Le roi charmant

Ah, le coup est trop fort ! Subitement !
Je sens dans mes veines se répendre le sommeil
le sommeil de l'hiver et l'attente de temps tendres
Que l'on fasse de somptueuses funérailles à ces fleurs
et que l'on m'apporte un lit...

Le roi s'allonge

Que l'on porte le boeuf à la boucherie...

Le père du boeuf

Majesté ! aies pitié d'un pauvre père
n'assombrit point une fin de vie exemplaire
soit clément, roi Charmant
je t'en supplie au nom de mes états de services
magnifiques et sans vices
N'oublie pas que je me suis foulé une patte dans un ravin
pour sauver un coquelicot si bien  !

La vache sucrée

Majesté ! aies pitié d'une pauvre mère
n'assombrit point une fin de vie exemplaire
soit clément, roi Charmant
je t'en supplies au nom de mes sacrifices
quotidiens et sans vices
N'oublie pas que toute ma vie, très pure,
 j'ai renoncée à la l'herbe comme nourriture
me contantant de riz au lait !

Tous chuchotant

Il a dit : « ce n'est pas mauvais, puis-je en avoir une autre ? »
rendez-vous compte », oh !
Les demoiseaux rougissent, les demoiselles font mine de s'évanouir

Les boeufs

L'histoire est inventée de toute pièce par les chats du palais !
c'est connu, ils sont jaloux de nos faveurs et cherchent à discréditer l'espèce bovine !

Les chats en riant

miaouh ! vous étiez témoin à l'instant ! 

Le roi charmant

Qu'est-ce encore de cette affaire ? La paix ! que me voulez vous ?

Le pére du boeuf

Bon roi, amnistie mon fils de la boucherie !

Le roi charmant

Soit ! c'est pour toi que nous y concédons !

La vache sucrée

Bon roi, donne lui la classification de B pour qu'il survive !

Le roi charmant entre deux baillements

Pour toi aussi encore que nous y concédons, sous condition qui'il s'en aille loin, très loin, le plus loin possible, pour ce qu'aucun membre de la Cour ne fût exposé à sa vue. Je le nomme garde-frontière, qu'il ne s'en éloigne jamais. Il portera des lunettes. C'est mon dernier mot

Il s'endore

Duo du père et de la mère

Fin misérable d'une enfance au pied du trône
Fin misérable 'une personne très bonne
notre fils jadis hors pair
est désormais garde frontière
Songe qu'on t'a sauvé la vie
Ne deviens pas aigri


narratrice

Tel était donc le boeuf que rencontra le roi Bagarre, au premier jour de son invasion. Conscient de sa valeur intellectuelle, se souvenant de son enfance aux pieds du trône, mais rappelé sans cesse au sentiment de sa déchéance par ses pantoufles et ses bésicles : un aigri.

SCENE 7 à la frontière

Le boeuf

Quel beau massacre de boutons d'or ! troupe joyeuse !
vas-y cisaille les barbelés, écorche toi et en toute inconscience !
écrase, écrase mes boutons d'or !
Ce n'est pas sans plaisir que je vois ces première dégradations !
J'imagine le désespoir de Marmotte, ah ah ah ah ah ! Je haïe les fleurs !

La narratrice à qui répond le boeuf qui acquiesce en soufflant du nez

Cependant tu tiens au peu de dignité qu'il te reste,
au galon bleu cousu sur tes protège-cornes,
aux couleurs nationales brodées sur tes pantoufles, rose et vert :
la fleur et la feuille.
Garde-frontière tu es, bon sens tu as !
voici le jour pour justifier ton titre.

Le boeuf se fait massif

Halte-là ! J'ai dit : Halte-là !

Les soldats

Comment halte-là ! On n'avance pas !
on se colle du sparadrap !

Bagarre

Une résistance !

Narratrice

Tu vois bagarre pour une fois que ce n'est pas des
« Ne vous genez-pas ! »
« Faites comme chez vous ! »
au pire :`
« Si c'est votre idée ! »

Bagarre

Oh toi la narratrice, n'en rajoute pas !

Oh boeuf viens que je t'embrasse, loyal ennemi !
je n'en crois pas mes oreilles, tu as dit
« halte-là »

Le Boeuf

Moui séigneur, halte-là !

Bagarre s'approche en écrasant une demi douzaine de pâqyerettes et trois crocus

Le Boeuf

Contravention !

Bagarre tire son sabre

Un soldat

Ah mais non, c'est la pose syndicale !

Un autre soldat

J'avoue que j'observe cette nouveauté avec un intérêt détaché,
on est en plein badigeonnage de mercurocrome et nous avons déjà fait un combat contre les barbelés, je propose que l'on vote une grève...

Deux soldats

C'est assez pour aujourd'hui, on est fatigués...

Un soldat

De toute façon, vous me le concédez,
il ne serait pas très poli d'untervenir
Bagarre et le boeuf semblent bien s'en tirer tous seuls...

Bagarre

En garde !

La narratrice

D'un coup de tête, le boeuf se débarassa de ses protège-cornes, d'un coup de pied de ses pantoufles, et, rendu à la liberté, se souvenant de ses sauvages origines, il se mit à piétiner le sol sous lui, oubliant règlements et précautions, et son éducation soignée, et sa studieuse jeunesse. Et les pâquerettes volaient, mes enfants ! Et les boutons d'or décapités tombaient dans la boue à Et les reines-des prés tâtaient de son sabot ! Cela faisait autour du boeuf un tourbillon coloré, une sorte de camouflage qui éblouissait Bagarre !

Bagarre

Quel procédé ingénieux ! quelle science du combat ! Bravo ! (il lève son sabre)

Le boeuf

Holé !

Un soldat

Cinq sous sur notre roi.

Un autre soldat

Quarante sous sur le boeuf, et mon lance-pierre !

Commence un ballet de tourbillons colorés qui s'approche, s'éloigne

Le boeuf

Et je te piétine, et je te piétine, et je te les fais voler, tes précieuses fleurs parfumées !



Bagarre

Et je te fait moulinet sur moulinet, et je te les coupe, et je te les tranche !
Et je te les fauche et je te les sabre tes calices de tranquillité

Les sodats

Oh la  belle bleue ! Oh la belle rouge !
C'est ce que l'on appellera dans les chroniques bagariennes
le combat de la Plaine-aux-Boeufs !