dimanche 25 mai 2008

Le ministère de l'orgue à Nice : croire, témoigner servir, c'est aussi pour les organistes

Cet article est autant un compte rendu des points capitaux enseignés par le colloque du 8 mai 2008 de l'Association Francilienne pour la Formation des Organistes en Liturgie qu'une invitation aux organistes du diocèse de Nice et aux prêtres à ce faire émule des avancées liturgiques en France à l'occasion du grand Synode. (On lira, dans un autre article, le résumé de la journée elle-même à Paris, les dires d'Eric Lebrun sur le répertoire d'orgue, les présentations de chaque évêché de la région francilienne non évoqués ici)

Allocution du Père Pierre Barthez, responsable national de la Musique Liturgique.

"L'orgue est une mission, un ministère de l'église. Un accent plus puissant à été accordé à l'orgue dans le nouveau Missel Romain (APGMF) : il est dit premier instrument dans la liturgie. Dans ce texte est manifestée la volonté de vouloir bénir nos orgues. Mission permanente, mission à retrouver. Il faut même donner le goût à d'autres de retrouver la dimension de l'orgue liturgique. C'est un avenir nouveau rempli de promesse. De même que l'animateur liturgique est redevenu pleinement un chantre, de même son action doit être partagée avec le rôle de l'organiste.

Il faut donc, pour l'organiste, s'engager, avoir une connaissance liturgique. S'engager dans l'intelligence de la vie liturgique de l'église, avoir une formation théologique, grande et passionnante. "La liturgie nous est donnée" a dit Vatican II, il faut engager notre talent, faire la redécouverte du sacerdoce commun des baptisés. Tous célèbrent : "tous font tout et chacun selon ce qu'il est". L'assemblée est célébrante. L'orgue en tant que participant à cette célébration ne peut admettre que l'on débute par la répétition de chant, inefficace et quasi vulgaire en tant que premier contact. Au contraire il est plus respectueux que l'orgue prélude à l'entrée dans la célébration. Ainsi l'organiste doit aider l'assemblée à faire Eglise.

L'Eglise est le lieu où la beauté doit avoir sa place : elle s'est employée pour des siècles et des siècles à donner de la beauté. Beau et gratuité, alliance de Dieu qui s'engage par amour pour nous et nous lui répondons par amour ! Or l'expression de l'amour se trouve en la voix de l'orgue qui sans parole est un don gratuit et ce qu'elle doit dire est l'amour.

L'orgue est symboliquement placé en hauteur, comme en ce lieu merveilleux de la cathédrale d'Albi où l'on voit les fresques du XVIIème siècle sans restauration aucune. Ces maîtres bolonais ont peint cette voûte pour signifier la liturgie : "nous chantons et nous proclamons Saint est le Seigneur le dieu de l'univers" : communauté du ciel, dialogue. Nous, organistes sommes la voix de cette communauté du ciel et faisons partie de la Grâce célébratoire.

Retrouvons la joie d'être organistes liturgiques. La littérature est exceptionnelle ! et la dimension de l'improvisation est à retrouver dans la liturgie. Aussi faut-il lancer un appel aux lieux de formations Anfol, association qui fait oeuvre utile. Décloisonnons nous, organistes, de notre situation en hauteur, et, parfois, optons pour nous faire remplacer et être chrétien dans l'assemblée : c'est ainsi délocaliser notre mission, situer notre dimension au delà de notre clavier. Une éducation d'organiste doit être d'abord riche en formation à la liturgie, on doit comprendre la liturgie à l'orgue, être également compétant au chant : nous sommes un membre de la communauté." (Père Pierre Barthez)

Propositions d'une structure aidant à relever la mission de l'organiste dans le diocèse de Nice, propositions inspirées des excellentes pratiques du diocèse de Meaux bâties à l'instigation de Jean-Jacques Donze.

Une priorité est de renforcer l'importance de la Pastorale Liturgique et Sacramentelle(PLS) d'une part comme soutien, conseil, garantie de compétences, aux yeux des prêtres qui recherchent un organiste, d'autre part comme tutrice, formatrice et pédagogue pour les organistes désireux de se forger un solide ministère.

I Gestion des titularisations par la PLS

a) importance de la titularisation

La titularisation est une protection que l'évêché se donne pour que l'Etat ne s'immisce dans le choix des organistes, car tel est son droit de nommer le titulaire là où l'Eglise n'y veille pas si l'Etat est propriétaire de l'instrument. En effet, les pouvoirs publics demandent qu'un titulaire soit nommé pour chaque instrument. Le titulaire est considéré par les autorités civiles et l'Eglise comme responsable de l'instrument. Il faut une dérogation pour qu'un organiste soit titulaire de plusieurs instruments, ce qui peut devenir fréquent depuis la répartition des messes d'une communauté sur plusieurs églises depuis Diocèse 2000.

b) importance du salaire du titulaire

Ceci a une incidence financière qui prend en compte le temps qu'un organiste a eu à se former, à payer ses études, le prix des partitions (taxées comme produit de luxe). Le salariat est partout prioritaire, le dédommagement pour le transport aussi. Là où seul le bénévolat est envisageable, il faut privilégier l'aide financière aux stages, à l'achat de partitions. Le logement de fonction peut être un dédommagement utile soumis à la dérogation exceptionnelle nécessaire pour l'hébergement d'un non clerc.
c) Solidité d'une titularisation s'il existe un diplôme PLS

Pour que la PLS puisse seconder les prêtres dans leur choix, et les organistes dans leurs compétences, il est primordial d'instaurer un diplôme PLS (qui dans un diocèse comme Meaux est désormais obligatoire pour les nouveaux organistes mais à Nice pourrait être facultatif). Ce diplôme n'aura de poids que si l'évêque l'accrédite et recommande les organistes qui en sont dotés à ses prêtres, il donnera une assise solide aux compétences d'un organiste titulaire.

d) présence de la PLS pour encadrer le choix d'un titulaire

Il arrive que le curé d'une communauté n'ait pas les compétences pour choisir lui-même un organiste, parfois il manque d'envie d'engager un ministère de l'orgue dans sa liturgie à cause de mauvaises expériences, d'une absence prolongée de la musique en sa communauté et ne voit plus l'utilité d'investir dans cette partie de la liturgie. Or il sera mis en confiance si son choix est encadré par un organisme spécialisé en ce domaine qui n'est autre que la PLS et si cet encadrement est recommandé par l'évêque.

Un seul postulant

Dans le cas d'une petite paroisse, s'il n'y a qu'un seul postulant, il est incité à être doté du diplôme de la PLS, ou bien à s'en doter. De cette manière on n'étouffera pas les vocations des jeunes. Un prêtre a le droit de donner confiance à un néophyte et de le prendre en contrat à durée déterminée, il peut fier son poulain à la formation proposée par la PLS.

Plusieurs postulants

Dans le cas d'une petite ou moyenne paroisse, s'il y a plusieurs postulants, le prêtre peut se fier à la formation d'un jury de concours comprenant :

a) Le curé, un chantre ou chef de coeur
b) Le responsable de la PLS, le responsable du Commission Diocésaine de la Musique et Liturgie (CDML), le responsable orgue du comité diocésain de la musique et liturgie (à Nice se pose le problème de ce que ce responsable est intégré à la Commission d'Art Sacré), un membre de la Commission d'Art Sacrée (CAS), un organiste compétent désigné par la CDML.

Dans le cas d'une grande paroisse ou d'une tribune où l'instrument nécessite un organiste de prestige, le concours prend une forme plus conséquente :

a) l'affectataire de l'orgue, le curé, un responsable chant ou chantre, le propriétaire du lieu
b) Le responsable de la PLS, le responsable du CDML, le responsable orgue CDML (à Nice CAS, si la répartition reste celle de tradition), un membre du CAS, un organiste compétent choisi par le CDML, un organiste national reconnu choisi par le CDML
c) un représentant culturel soit de la mairie, soit du conservatoire

Souplesse nécessaire

Le gré à gré doit être respecté et privilégié dans plusieurs cas :

Par rigidité politiques internes où l'avis de l'évêque permet de trancher si le soutien de la PLS est souhaitable ou non.

Par manque de postulant (cas envisagé déjà), par initiation de débutant (cas du Contrat à durée déterminée). Etc.

II Comment attirer les organistes vers la formation PLS ?

Dans cet exposé assez technique, il faut rappeler toujours que l'organiste n'est pas qu'un exécutant et que sa mission est avant tout liturgique. Envisageons les différents cas : débutants, amateurs, professionnels.
- Le débutant est aussi neuf dans le maniement de l'instrument que dans son cheminement spirituel, il sera plus facilement enclin à comprendre l'utilité d'une formation liturgique.
- L'amateur s'il dispose de moyens exécutifs modestes aura une véritable demande pour les mettre en oeuvre dans la façon qui aura le plus de sens liturgique puisqu'il est proportionnellement venu en plus grand nombre à l'orgue par vocation religieuse.
- Beaucoup d'organistes professionnels n'ont pas de connaissance liturgique et n'envisagent pas leur travail comme un ministère, plusieurs sont même athées. Il est ainsi important de les sensibiliser aux écueils des habitudes et à la nécessité d'une vraie formation liturgique. Leur choix d'adhérer à une formation PLS sera souvent personnel à moins d'une demande explicite du curé de la paroisse.
- D'autres organistes professionnels ont un acquis personnel solide et seront appelés à être les enseignants pour ce diplôme, participant ainsi à l'affermissement de la confiance que tous pourraient avoir dans le ministère de l'orgue.

Dans les trois cas, le diplôme PLS devient important si l'évêque le "labellise" et le recommande à tous.

Nécessité d'une création d'une Azur-fol

La présence d'un délégué d'une antenne de l'ANFOL (Association Nationale de la Formation des Organistes Liturgiques) au sein de la PLS permet aux organistes d'avoir une voix personnelle dans ce cursus. Le milieu associatif responsabilise et focalise l'investissement personnel des organistes dans le cadre de la liturgie. L'ANFOL non seulement propose de mieux connaître la liturgie mais enseigne les techniques instrumentales selon leur emploi pour participer à la célébration : l'accompagnement des chants, l'improvisation (selon le niveau de chacun) permettent principalement aux amateurs d'améliorer leur niveau en même temps que leur conception célébratoire.

Les formations de l'Anfol, loin d'être un doublon de celles de la PLS, les complètent et les soutiennent car elles viennent du sein des organistes eux-mêmes et sont à l'écoute de leurs revendications. Le travail de l'Anfol est unanimement reconnu et apprécié de l'Eglise.

Aide financière de la PLS aux formations

Il convient d'envisager un fond d'aide à la formation des organistes des paroisses les plus démunies. Ceci implique une structure pour acquérir ce fond ou un choix financier de la part de l'évêché.

Attitude optionnelle

Au départ ce rôle renforcé de la PLS permettra surtout aux petites paroisses d'adhérer à un mouvement qui les soutient. Il ne peut cependant intervenir là où une tradition solide donne des preuves patentes de bon fonctionnement. Beaucoup de prêtres, satisfaits de leurs organistes ne solliciteront pas l'acquisition du diplôme PLS pour leur tribune. Ils n'auront pas non plus recours à la PLS dans leur choix d'organiste titulaire. Il serait cependant souhaitable que l'évêque leur recommande d'en informer la PLS.

En revanche, l'évêque pourrait ou non, suivant les cas, utiliser lui-même cette structure pour imposer la présence d'un organiste aux paroisses où les tribunes doivent renaître soit pour des raisons historiques, soit pour des raisons de fréquentation, de spécialisations célébratoires (mariages, funérailles) et toujours par nécessité du ministère liturgique.

Publicité du ministère de l'orgue

Il faut dans tous les cas militer pour l'importance du ministère de l'organiste selon Vatican II, les communications dans le sein de l'évêché, la création de l'Azur-fol permettrait de faire progresser la pensée. Rappelons que le respect des autres instruments est de rigueur pour la fonction liturgique tout comme il convient que, là où l'orgue est réduit au silence par le déclin d'une tribune, les autres instruments respectent son droit à ne pas mourir et à reprendre le service liturgique dont la noblesse est soutenue par le nouveau Missel Romain.

Conclusion

Voici une paraphrase des bénédictions de l'Orgue en forme de litanies qui résument sa vocation :

Eveille-toi, doux Orgue, dispends Dieu donnant l'Amour !
Nos voix te répondent, Orgue, quand en ta voix résonne la Grâce !
Ton Ministère, pieux Orgue, sera Communauté du Ciel !

Sois béni, Orgue, pour célébrer Jésus !
Tu chanteras, Orgue, le Souffle de Dieu, l'Esprit Saint !
Fais monter, Orgue, nos suppliques vers Marie !
Fais nous entrer, ô Orgue, fidèles, en l'action de Grâce !
Apporte le réconfort à ceux qui sont en peine !

Accepte pour nous, Orgue, la gratuité d'être beau !
Sois Don sans mots, bel Orgue, et sans parole Dialogue d'en Haut !
Ton Ministère, pieux Orgue, sera Communauté du Ciel !

Eveillez-vous, grandes Orgues, instruments sacrés !
Entonnez, Orgues, la louange de Dieu !
Soutenez, Orgues, la prière des chrétiens !
Proclame, éclatant Orgue, gloire au Père, au Fils et au Saint-Esprit
















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