mercredi 14 juillet 2010

Feux d'artifice et nounours domptent la terreur

Il fallait voir hier soir les feux d'artifices de la couronne parisienne sortir de toute part des toits de la capitale, c'était, stylisé, comme si les immeubles brûlaient et l'on ne pouvait s'empêcher de songer aux images de la destruction de Varsovie. Et pourtant c'était grande joie, belle poésie... Le ciel avait beau retentir de coups de canon dont la rumeur eut fait frémir le Paris de 1944, c'était tranquillité, réjouissance : et ce matin aussi, ces avions en ballet aligné, au lourd bruit inquiétant : inoffensifs et protecteurs ! Et que fête-t-on ? le 14 juillet, oui jour de joie, de libération, de violence aussi, précurseur bientôt de la terreur.
De même dans le Paravent des âmes du purgatoire, le père peintre regarde brûler sa fille dans un feu d'artifice subjuguant comme il avait demandé à l'empereur de brûler une courtisane coupable dans un carosse royal pour pouvoir finir son tableau. La beauté de l'art l'emporta sur la cruauté vicérale du fait.

Voici donc la fonction profonde et première de cette maîtrice du feu fait beauté et fascination : que les petits enfants frappent des mains, sur les remparts de leurs balcons et s'endorment tranquilles, tout rassurés parce que l'homme si sauvage est art.
Feu inoffensif, danger à jamais dompté, bêtes sauvages domestiqués, frayeur conjurée.
Qu'est-ce qu'un ours ? Voyez ses squelettes au Muséum de l'Histoire Naturelle : un monstre dangereux, aussi grand, aussi effrayant que les dinosaures qui sont exposés en face ou bien dans l'exposition "à l'ombre des dinosaures".
Le voici transformé en nounours le meilleur compagnon des petits, la sécurité.
De même, Porte de Versailles, on veut impressionner les enfants avec les grandes dents en plastique des monstres crétaciens. Ils sont là grandeur nature, avec des ventres qui respirent et des yeux qui clignotent - mais de nos jours ont a peu le goût de la finesse et leurs couleurs sont d'un vulgaire kaki militaire, leurs plumes des fourrures, on s'arrête à ce que l'on s'imagine suffisant pour les yeux d'enfants, dommage... et l'on finit par un film en trois dimensions pour avoir très très peur et s'y croire. Bienvenus au pays des monstres !
Revenons à l'exposition du Muséum d'Histoire Naturelle, à la grande galerie de l'évolution "à l'ombre des dinosaures" où nous fûmes petites souris aux pieds d'un gigantesque lambéosaure et d'un terrifiant albertosaure. Dans la librairie on vend des peluches de dinosaures toutes attendrissantes, de beaux ornithoryncs, un mammifère aux doux yeux gigantesques, notre petit coeur fond, nous voici tranquilles, sécurisés: bienvenus au pays du Monstre Gentil et c'est la paix en ce 14 juillet.

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