jeudi 29 juillet 2010

Réquisitoire pour faire bouger les volontés à Nice


(Suite à la réponse négative de Mgr Pontier, métropolitain, à l’appel précédent).

Je voudrais le thématiser, ce réquisitoire, sur l’amour dans l’agir. Car ce n’est pas une chose aisée, tant selon le mot d’Emmanuel Bellanger, « nous avons raison tous ensemble et non seul ».
Je ne partirai pas d’emblée sur l’explication de l’expression « amour dans l’agir », mais poserai au fur et à mesure les jalons de la transformation de la pensée qu’il faut pour que l’on puisse agir chez nous, à Nice, suivant l’enseignement reçu à l’Institut Catholique de Paris.
Entre autre pour illustrer mon propos, je retiens de cet enseignement, parmi les notions historiques dans les cours sur le chant Grégorien de Dom Saulnier, la publicité par le pouvoir carolingien d’un antiphonaire prétendument authentique et trop lointain pour être vérifiable, là-bas à Rome, dans un local de la Scola Cantorum du défunt Pape Grégoire, bien utile pour labelliser le métissage de Rome et du chant Gallican qu’on ne pouvait éradiquer, bien utile pour promulguer universel cet hybride inattendu. Et je suis loin de retenir cet élément par hasard : les carolingiens ayant compris qu’ils pouvaient mieux encore faire l’unité du peuple par la culture que par la guerre et cette unité ce faisait par le chant.
De même ce n’est pas un hasard si je retiens le parallélisme de cette tendance carolingienne avec les buts de la restauration-reconstruction au XIXème du chant dit grégorien, bientôt proclamé par Pie X comme particulièrement propre à l’Eglise, toute chose dont nous a parlé Rémy Campos à l’Institut Catholique et qu’à Solesmes j’ai pu toucher du doigts dans les ouvrages de Dom Mocquereau, ouvrages si décriés de nos jours et dont le seul but était de trouver une méthode et des règles faciles pour faire sentir la souplesse de la langue latine à tout un peuple.
C’est que tout cela, préfigure plus qu’on ne le pense Vatican II : tout cela montre combien la ferveur du chant et de la musique fait corps, combien l’agir du musicien participe à l’église en tant que corps. Que cet agir ne peut être mis en œuvre que par la foi de toute l’église en tant qu’elle est un corps. Combien le musicien que je suis adhère au projet de l’Eglise : tel, cette année, a été également à l’Institut Catholique l’enseignement de Pierre Barthez.
Voilà que cette année donc, j’ai cherché à situer mon agir en tant que ministère dans la propre activité du Christ lui-même, quand, là, présentement, dans la célébration « le fils se communique et donne à célébrer sa propre relation au père » (Pierre Barthez). Bach savait cela. Chacun de nous musicien peut aboutir par son travail à l’excellence dont témoigne l’enseignement pédagogique de Bach, dévoué à la sainteté. Jusque dans son agir hors de l’église, envisageant toutes conséquences « ramifiantes » en tout domaine, sacré, profane, en tout instant de vie.
Aussi l’agir de chacun ne peut s’arrêter à soi-même. A l’exemple du Christ l’agir est pour tous. Mon « je » n’est certes pas suffisant, développons ce qu’il représente dans ce projet et l’on verra qu’il faut un « tous ».
Je suis venu au CML, mandé par mon église de la Côte d’Azur, afin d’avoir les outils pour essayer de lancer une formation des organistes liturgiques dans le Sud de la France. Ou bien si l’on envisage moins utopiquement : mes études tendent vers l’acquisition d’un diplôme permettant de montrer patte blanche dans mon Diocèse. Car même mon Diocèse n’est pas tout acquis à la cause où il m’a envoyé puiser, il a tout à construire, il veut être sûr de qui va le persuader de créer sa Commission Diocésaine de Musique. Or, ce projet de la Commission Diocésaine de Musique ne pourra se faire, entre autre, qu'avec un diplôme à l'appui du membre le plus actif pour être crédible auprès des instances de l'Evêché.
Serais-je cette personne ? J’en doute fort, l’humilité doit bien me persuader que je n’ai pas les qualités requises : elles sont d’abord d’autorité. J’ai donc échoué à cette tâche. Cependant, je peux avec chaleur exhorter d’autres mieux dotés en tempérament à suivre la même voie que moi, la mieux tracée , la meilleure : suivre l’enseignement de l’Institut Catholique de Paris pour la liturgie et la musique liturgique afin que, fidèles à Vatican II, nous puissions ici à Nice nous organiser efficacement et saintement tous ensemble.
Chez nous, je l’espère (tel est le meilleur plan que le Vicaire général, le responsable de la Pastorale Liturgique et Sacramentelle et moi-même, en tant que responsable de l’orgue, avons pu dessiner), la Commission Diocésaine de Musique commencera par une Commission de l’Orgue qui reprendra le flambeau de celle défunte en 1974, avec la participation de son ancien président, René Saorgin, organiste honoraire de la cathédrale de Monaco, et professeur honoraire du conservatoire de Nice.
René Saorgin : étant proche de lui, j’ai sollicité sa retraite. Plus que moi, aux yeux de l’évêché, il est une caution . Le Vicaire général cosignera la lettre d’Etats-généraux des organistes liturgiques, écrite par le père Filippi, responsable de la Pastorale Liturgique et Sacramentelle, relue par René Saorgin.
En compagnie donc de mon vénérable ancien professeur, Maître Saorgin, et tout comme lui, je suis très conscient que je vais bâtir les choses mais que d’autres que moi seront responsables au bout des chaînons du travail, tant les imbrications diplomatiques sont nombreuses à Nice et j’en appelle à tous les organistes d’ici pour s’interroger eux même sur leur volonté d’engagement. Ma présence, du moins au départ, fera que les choses auront pour racines les acquis de l’ISL de Paris, celle des autres fera le succès de la nouvelle structure.
Quant au projet d’une association azuréenne de la formation des organistes liturgiques vite affiliée à l’Association Nationale de la Formation des Organistes Liturgiques, je l’ai défendu désespérément à la réunion interdiocésaine des PLS de la région Provence. Cependant j’étais seul et sans autorité. Vous avez ici jointe la réponse du Métropolitain, Monseigneur Pontier. Il n’y a pas lieu, dit-il, de créer une structure régionale, il vaut mieux travailler avec la structure nationale. J’en appelle à vous, Emmanuel Bellanger, à l’ANFOL. La structure nationale désire-t-elle travailler avec la région ? Répondra-t-elle au désir du Métropolitain ? Doit-on envisager, lors de la réunion constitutive de la Commission de l’Orgue du diocèse de Nice, de proposer une motivation de l’ANFOL à travailler en liens serrés avec cette nouvelle commission ? Et les activités porteront-elles le nom de cette AZURFOL ou FAZUROL que les évêques du sud ne souhaitent pas pour l’instant voir naître comme association indépendante, même pour un bref temps, de l’association nationale ? Ou bien serrait-ce l’ANFOL qui, en prompt renfort, expliquera directement aux autorités ecclésiales le bien fondé de mon idée ?
A toutes ces questions je réponds que le mieux et que nous créions ensemble, sur Nice, cette association FAZUROL que j’ai décrite dans un autre article : « Pour la réouverture d’une commission de l’orgue au diocèse de Nice et la création d’une formation des organistes liturgiques. ». Et je ne suis pas le seul à y répondre, car les ayant posées à MM Emmanuel Bellanger et Pierre Barthez, ils répondirent à la volonté de Monseigneur Pontier en affirmant qu’ils soutiennent le beau projet de FAZUROL et qu’ils sont ouverts à toutes les propositions des Evêques du Sud de la France pour travailler avec les structures nationales dont ils sont les ambassadeurs : l’ANFOL (Association nationale de la formation des organistes liturgiques) et le SNPLS (Service nationale de la pastorale liturgique et sacramentelle).
Allons, l’amour dans l’agir ! Gens de Nice, vous ne souhaitez pas que Paris, que la France dise : « Il est certain que dans le sud de la France, il n’y a pas d’entrain commun à construire du nouveau, l’immobilité, la pérennité des situations anciennes ont souvent plus de force que les enthousiasmes. » ? Gens du Sud, je voudrais vous entendre dire vous-même : « Il faut temps, patience, amour, organisation, persuasion, ne pas avoir raison seul mais en commun. Il faut de l’énergie. » !
Ici la question se pose sur la priorité de l’énergie, et d’autant plus après un beau Synode : « témoigner, croire, servir ». Servir.
Il m’est arrivé de penser à l’énergie d’un Saint. J’ai été frappé de la figure de Saint Damien de Molokaï au point de faire la veillée de Noël des enfants de Beaulieu sur son histoire. Ce n’était pas triste du tout, avec, à la fin, cette princesse Liliuokalani déposant des dons, sa sœur, des vêtements, son ministre des médicaments, aux pieds de la crèche du Jésus des lépreux. Si l’urgence, l’immédiateté, c’était le combat de la charité envers ces malheureux, il n’en demeure pas moins que Damien lutta aussi pour l’adoration perpétuelle à Kalawao de Molokaï, et celle-ci qui aurait pu paraitre, en superficie, plus secondaire, contribua si sublimement à la renaissance des âmes malades.
Il en est de même partout. Déjà dans ma propre église de Beaulieu, où les tuyaux de mon orgue (digne de la beauté liturgique) s’effondrent mais sont moins prioritaires que la construction de la chapelle d’Eze. Le choix sera peut-être de laisser mourir l’orgue. Il faudrait créer dans cette paroisse un élan de fraternité, faire naître le sentiment de bâtir une seule et même Eglise, de la chapelle à l’orgue, et cette construction musicale qui paraissait moins immédiatement utile, pourrait alors s’insérer dans le cœur de la communauté.
Il en est de même pour la formation des organistes liturgiques dans la région Provence Alpes Côte d’Azur. Certainement suivrait-on plus une aura qui se dévouerait aux plus malheureux et qui secondairement tiendrait aussi à aider les communautés les plus démunies dans leur droit à une belle liturgie avec musique.Alors cette personne dont l’énergie toute entière est tournée dans le seul but de la charité pourrait être utile à un tel projet. Elle pourrait avoir l’autorité nécessaire (dans le sens de faire grandir) comme Saint Damien l’eut pour mille projets sur son rocher de Molokaï. Je ne dis pas qu’il faudrait un Saint, mais un homme entièrement voué, dans toutes ses forces, à l’émulation du Christ : un prêtre peut-être.
Je me suis posé la question s’il n’y avait pas de but plus noble que la musique dans ma propre vie. Il faut beaucoup d’énergie pour être dans la musique et il en reste peu pour déplacer la montagne de la Sainte Victoire. Et ce n’est certes pas au terme d’une formation qui m’a soutenue dans l’acceptation d’être enfin musicien que je vais changer la direction de mon fuseau d’énergie. Mais j’en appelle ici aussi aux prêtres de Nice : n’oubliez pas la musique, beauté au service de l’amour du Christ : agissez avec nous, musiciens, pour que le diocèse se dote des instruments adéquats à dispendre la beauté sur le cœur des chrétiens, des instruments qui sont la voix de la communauté du ciel quand nous sommes celle de la communauté d’ici bas.
Je ne suis donc ni l’autorité nécessaire pour faire bouger les volontés, ni un prêtre pour obtenir les adhésions par une belle pastorale, tout au plus puis-je faire l’orateur de ce réquisitoire envers les futures grandes volontés du sud pour ces projets. Pour ces projets pourtant, qui m’ont fait venir étudier à Paris, je ne baisserai pas les bras, non ! Mais au contraire, je réalise qu’il faut plus d’humilité et d’amour dans l’agir : et je m’adresse à vos cœurs de musiciens.
Voilà bien ici définie la notion dont je parlais au départ : l’amour dans l’agir. Avoir vocation de musicien, être plus humblement, mais avec autant d’amour, au service du Christ et de l’Eglise. Accepter de voir, (pourquoi pas ?) mourir l’orgue de Beaulieu-sur-Mer sans colère . Accepter qu’il faille encore des années avant que les évêchés du sud soutiennent ensemble une formation liturgique organisée de leurs organistes et un certificat au terme. Accepter qu’ici les sublimes phrases sur l’orgue de Sacrum Consilium ne touchent pas tant les cœurs qu’on le rêverait… attendre… mais puiser son bonheur dans la joie des enfants qui ont joué la veillée de Noël sur Saint Damien et qui s’en rappelleront toute leur vie, c’est assez.

ANNEXE
courriel du Père Stéphane Cabanac Arles, le 19 janvier 2010
12 rue du Cloître
13200 ARLES
Objet : lettre aux délégués diocésains de PLS - AS - ML
Chers amis,
(…)
J’ai eu Mgr Pontier au sujet de la proposition de Cédric Costantino.
Il ne lui semble pas indispensable de créer quelque chose au niveau provincial car il existe une structure nationale et il vaut mieux travailler avec elle.

Je vous souhaite une sainte et heureuse année.

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